Les jugements hâtifs qui nous égarent

 Dans Christ Seul

Rendre la justice est un travail long et complexe. à ce propos, le livre du Deutéronome propose une formule qui me plaît bien. Dans le langage hébreu, toujours haut en couleurs, il est écrit, littéralement : « La justice, la justice tu poursuivras, afin que tu vives » (Dt 16.20). J’entends là deux choses. La première est qu’il y a toujours un reste d’incertitude dans la justice que l’on rend : on n’est jamais sûr d’avoir atteint la justice, mais on la poursuit. La deuxième est qu’il faut prêter attention à cette poursuite et plutôt deux fois qu’une. Le texte répète : la justice, la justice. Il confirme que la justice n’est pas quelque chose d’évident, qu’il faut y regarder à deux fois, approfondir la question, ne pas s’arrêter aux premières impressions. J’ai entendu un juif dire qu’un tel verset fondait, par exemple, le droit à un appel dans un procès. Même une cour de spécialistes du droit peut faire erreur lorsqu’elle juge.

Photo (marteau) : www.pixabay.com

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LENTEUR DE LA JUSTICE

On se plaint volontiers de la lenteur de la justice. Elle est, en effet, parfois un problème. Mais le temps de réflexion, de délibération, fait partie intégrante de la construction d’un procès. Les magistrats prennent le temps d’examiner le problème sous tous ses angles, de mener des enquêtes. Les diverses parties ont l’occasion de donner leur point de vue, d’être questionnées et contestées publiquement. Chacun plaide, puis, au terme de débats parfois longs et tendus, le jugement est prononcé.

Cette organisation, qui est portée à l’extrême du fait des lourds enjeux en présence, inspire également le débat scientifique, où les affirmations sont soumises au tribunal des différents chercheurs compétents.

CAFÉ DU COMMERCE ET INTERNET

Ce qui se passe « au café du commerce » s’oppose trait pour trait à de telles démarches. Les jugements sont hâtifs, on ne prend pas le temps d’entendre et encore moins d’essayer de comprendre le point de vue adverse. Les contradicteurs sont absents. Ce n’est pas la mise en perspective que l’on cherche, mais le trait d’esprit, la formule vache et, si possible, définitive.

Or cette situation tend à se répandre, aujourd’hui, très au-delà du café du coin : dans les forums d’échange sur Internet, au travers des tweets vengeurs, dans les « petites phrases » qui nourrissent le débat politique, ou au travers des partis populistes de tout poil. Les prises de parole, sur les plateaux de télévision, sont de plus en plus brèves. L’accélération du débat tue le débat. La communication à distance, où l’autre disparaît de l’horizon, rend impossibles les compromis, les explications, le dépassement des oppositions.

Paul, par contraste, emploie toute la deuxième épître aux Corinthiens à essayer de traiter un désaccord entre lui et certains dirigeants de cette église. Il encourage les Corinthiens à faire preuve de lucidité, à se ressaisir. Il écrit pour anticiper sa venue et rappelle, finalement, la règle : « Toute affaire sera décidée sur la parole de deux ou trois témoins » (2 Co 13.1).

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