LES DÉNOMINATIONS DOIVENT-ELLES DISPARAÎTRE ?

 Dans Christ Seul, Explorer

Les dénominations n’ont pas vraiment bonne presse aujourd’hui où l’on préfère le non-dénominationnel. Qu’en penser ?

Les dénominations n’ont pas vraiment bonne presse aujourd’hui où l’on préfère le non-dénominationnel. Qu’en penser ?

J’entends souvent l’argument suivant : « Etre baptiste, mennonite ou méthodiste, ce n’est pas important. L’important, c’est d’être chrétien. » Les dénominations apparaissent comme des carcans dont on ferait bien de se débarrasser ; elles détourneraient de l’important, c’est-à-dire de Dieu et de la relation avec lui. Les dénominations sont aussi vues parfois comme la cause des divisions qui séparent les chrétiens en de multiples chapelles, chacune pensant avoir raison !

Tour d’horizon

La culture ambiante renforce encore cet
a priori négatif envers les dénominations : on préfère garder sa liberté de croire plutôt que de se rallier à une confession de foi, on hésite à devenir membre d’une Eglise dénominationelle, préférant fréquenter toutes sortes de milieux évangéliques ou chrétiens. Les jeunes (mais pas que !) sont attirés par le zapping ecclésial.
Le courant charismatique a traversé bon nombre de dénominations et les influence ; il apparaît parfois comme une critique des dénominations qui auraient tendance à se scléroser voire à fossiliser la vie de l’Esprit qui fleurirait ailleurs.
Le courant des Eglises émergentes cherche à adapter la forme de la vie d’Eglise aux réalités culturelles de notre époque. Pour rejoindre les gens, il faut se débarrasser des étiquettes et des traditions dénominationnelles, repenser toute la vie de l’Eglise, limiter au maximum les structures, les confessions de foi, les règlements intérieurs, etc. que les Eglises installées affectionnent.
Sur Internet, les sites « évangéliques » qui se nomment « chrétiens » sont probablement parmi les plus fréquentés de la « sitosphère » évangélique francophone : http://actualitechretienne.wordpress.com ou http://topchretien.jesus.net par exemple. Le site dénominationnel des Editions Mennonites fait figure de dinosaure en comparaison !
Ce tour d’horizon conduit à poser la question : faut-il espérer la lente disparition des dénominations, distractions de l’essentiel de la foi, obstacles à la vie de l’Esprit, causes de divisions, reliques du passé obstruant la voie à l’Evangile et à la mission de l’Eglise ? Faut-il oeuvrer à leur mort programmée en vue d’un renouveau de l’Eglise ? Bref, les dénominations doivent-elles disparaître ?

Quand elles sont le problème…

Il faut reconnaître que les dénominations, apparues surtout depuis le 19e siècle, sont parfois le problème. Elles brouillent le message chrétien. En 1993, on affirmait qu’il y avait 25 000 dénominations chrétiennes dans le monde, dont 14 000 pentecôtistes. Alfred Kuen a écrit : « Le résultat de 20 siècles de séparation, c’est une chrétienté divisée en quelques centaines de groupes qui se réclament tous du Christ, qui s’ignorent ou même se combattent mutuellement et dont la plupart prétendent être les seuls défenseurs de la Vérité. » Cette situation a commencé en quelque sorte à l’Eglise de Corinthe où des clans se réclamaient de Paul, d’Apollos, de Pierre et du Christ (1 Co 1.12).
Les dénominations peuvent être l’expression de luttes de pouvoir, véhiculer de l’orgueil spirituel et une mentalité de la rupture ; elles ont contribué à l’exportation des divisions lors du mouvement missionnaire. Il est bon d’en avoir conscience. Pour autant, le salut de l’Eglise est-il dans leur disparition ?

Quand elles sont utiles…

Pour Etienne Lhermenault, président du Conseil national des évangéliques de France (CNEF) – effort récent pour réunir le monde évangélique français sous un même chapeau, « les dénominations apportent souvent des accents utiles au témoignage chrétien. Elles témoignent de la fidélité de Dieu et de la persévérance de ses enfants dans des circonstances particulières. Ainsi, il n’est pas indifférent de savoir que le méthodisme est le fruit d’un réveil qui a voulu renouveler l’Église anglicane au 18e siècle. Elles apportent aussi une certaine sensibilité, spiritualité, attention à tel aspect du témoignage qui complètent celles des autres. Ainsi, les dénominations pentecôtistes et charismatiques encouragent les autres dénominations à ne pas minimiser l’œuvre et l’efficacité de l’Esprit. » Pour le président du CNEF, il ne serait pas souhaitable que les dénominations disparaissent un jour. Pour lui, « la vraie question est celle de l’attitude de cœur. Si les responsables des dénominations font preuve d’ouverture et d’humilité, l’abandon des étiquettes n’apportera pas grand chose à l’unité. »
Selon Neal Blough, historien du christianisme, il est peu réaliste de penser que les dénominations puissent un jour disparaître, « étant donné les milliers de dénominations qui existent et leurs origines fréquentes dans le conflit et le schisme. » D’ailleurs, souligne-t-il malicieusement, « quand on crée une Eglise ou un groupe en réaction aux dénominations, cela revient à en créer une nouvelle. » Par exemple, les Eglises émergentes ou les Eglises charismatiques sont aussi devenues « dénominationnelles », à certains égards en tout cas.
« Les dénominations peuvent rappeler des éléments de la foi chrétienne qui sont oubliés, mis en sourdine ou même contestés par d’autres chrétiens », ajoute Neal Blough. Les mennonites par exemple peuvent apporter leurs convictions non-violentes basées sur l’enseignement et la mort du Christ. Et recevoir des autres dénominations des interpellations utiles. Pour Neal Blough, qui a participé au dialogue catholique-mennonite au niveau mondial (1998-2003), « les dénominations qui cherchent à se connaître et à se rapprocher sont facteurs d’unité chrétienne. » 

Quête de la vérité

En fait, on pourrait dire que les dénominations sont une manière de jouer franc jeu : elles affichent leurs accents théologiques. Car même les organisations non dénominationnelles sont en réalité influencées par un ensemble de convictions, sans les énoncer explicitement. Il est bon d’en être conscient.
Alors, être baptiste, mennonite ou méthodiste, est-ce sans importance ? Et si les dénominations étaient aussi l’expression de la quête de la vérité de l’Evangile ?

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