TRAÇABILITÉ DES PERSONNES

Les récentes révélations à propos des programmes de surveillance de masse via Internet rendent ce sujet plus actuel que jamais…

Un expert en sécurité de l’information écrivait récemment : l’Etat espion actuel résulte d’un partenariat du gouvernement avec les entreprises privées d’une part et de notre disposition à divulguer des informations privées pour notre confort d’autre part.

Notre part de responsabilité

Si l’Etat exigeait que nous portions tous une balise de localisation (comme certains prisonniers en liberté conditionnelle), nous protesterions. Et pourtant, nous avons tous un téléphone mobile dans la poche. Si les autorités exigeaient que nous mettions la police en copie de tous nos courriers électroniques, nous serions scandalisés. Et pourtant nous envoyons nos messages les plus personnels par GMail, Hotmail, la messagerie de Facebook ou des SMS.
Toutes ces entreprises informatiques et de communication s’efforcent de gagner notre confiance pour gérer notre identité électronique ; mais elles trahissent aussi cette confiance en vendant nos données et, comme Edward Snowden vient de le rappeler au monde entier, en les transmettant aux services secrets.
Par le passé, il était laborieux et coûteux de récolter des données ; on ne récoltait que les données nécessaires pour répondre à des questions précises. Aujourd’hui, cette collecte est devenue facile et bon marché : on récolte donc tout et on décidera plus tard ce qu’on en fait. Cela signifie que ce que l’on recherche dans une base de données peut s’écarter sensiblement du but initialement communiqué. A partir de données en apparence anodines, fournies sans méfiance au travers de mes achats, de mon activité sur les réseaux sociaux, de mes recherches sur Google, de mon téléphone mobile, il sera possible de déduire des informations telles que ma couleur de peau, mon orientation politique, mes préférences sexuelles, ma santé, mes déplacements, etc.

Tyrannie clé en main à l’horizon ?

L’exploitation de ces données permet d’améliorer par exemple les réseaux de transports publics, ou, comme le prétendent les autorités américaines, de déjouer des attentats terroristes. Mais elles permettent aussi à l’Etat de « fliquer » les citoyens et aux compagnies d’assurances d’éliminer les « mauvais risques ». La connivence entre les pouvoirs politiques et les poids-lourds de l’informatique et de la communication laisse craindre une érosion rapide de droits civils fondamentaux propres à nos sociétés occidentales et démocratiques. Elle laisse entrevoir l’émergence de formes d’aliénation nouvelles, voire la possibilité d’un système de « tyrannie clé en main ».
L’Etat dépend aujourd’hui de l’exploitation de volumes de données toujours plus importants pour remplir sa fonction de gestion, de surveillance et de protection. Mais il est indispensable de comprendre comment cette dépendance menace la sphère privée et les droits civils.
Par des dispositions légales et un système de contrôle adéquat, il est nécessaire de rétablir un lien entre ce que les données contiennent et ce pour quoi elles peuvent être utilisées. Par exemple, la connaissance de mes goûts musicaux pourrait permettre à un magasin de me faire des propositions de CD ou de concerts, mais ne devrait influencer ni les décisions de ma banque pour un crédit, ni celles de l’Etat pour l’octroi d’un visa.

Liberté

Au travers de l’Histoire, les Eglises ont activement combattu diverses formes de tyrannie ; elles ont contribué à l’abolition de l’esclavage en Amérique du Nord ou à l’ouverture du rideau de fer en Allemagne de l’Est. Leur lutte était menée à la fois depuis l’intérieur des institutions et en opposition à celles-ci. Face à la surveillance totale qui se profile inéluctablement, les combats passés pour la liberté peuvent nous inspirer. Il est bon de se souvenir que le Dieu de Jésus-Christ est fondamentalement un Dieu libérateur, pour ensuite tenter d’imaginer une éthique chrétienne à l’ère numérique.