ARTICLE 23 – LES RELATIONS DE L’ÉGLISE AUX AUTORITÉS ET À LA SOCIÉTÉ

 In Confession de foi

Nous croyons que l’Église est la « nation sainte » de Dieu1 appelée à la fidélité complète au Christ, son chef, et au témoignage de l’amour salvateur de Dieu envers toutes les nations.

Dans sa dimension spirituelle, sociale et politique, l’Église promet fidélité à Dieu seul. En tant que citoyens du Royaume de Dieu2, nous nous savons protégés par la puissance de l’amour divin. L’Église n’a pas de frontière géographique et ne fait pas appel à la violence pour sa protection. Seule nation chrétienne, l’Église est composée de gens de toutes tribus et nations3 appelés à témoigner de la gloire de Dieu.

Les autorités gouvernementales du monde ont été instituées par Dieu afin de maintenir l’ordre dans les sociétés ; ce n’est pas le rôle de l’Église. En tant que serviteurs de Dieu, de tels gouvernements ou institutions sont appelés à agir avec justice et à faire régner l’ordre4. Mais comme toute institution, les nations ont tendance à dépasser leur mandat fixé par Dieu. Elles deviennent alors idolâtres et rebelles à la volonté divine5. Par ailleurs, aucun gouvernement n’accomplit pleinement la justice de Dieu.

En tant que chrétiens, nous respectons les autorités et prions pour tout être humain, y compris pour les membres des gouvernements, afin qu’ils permettent au plus grand nombre de personnes de mener une vie dans la paix et la justice6. Nous devons, lorsque nous participons à une institution publique ou privée, faire preuve de discernement. Il s’agit d’examiner si notre participation à ces structures ne contrevient pas à l’amour que nous devons à toute personne et à la sainteté à laquelle nous sommes appelés en Jésus - Christ. Parallèlement, nous témoignons du Christ aux nations en étant telle « une ville au sommet d’une montagne »7. De même, en tant qu’ambassadeurs du Christ8, nous incitons les nations, leurs représentants et leurs institutions à exercer justice, paix et compassion envers tous. Nous recherchons ainsi le bien de la ville où Dieu nous a placés9.

Nous comprenons que, par sa mort et sa résurrection, le Christ a vaincu les puissances, y compris les gouvernements rebelles10. En confessant que Jésus - Christ est Seigneur des seigneurs, nous reconnaissons et proclamons qu’aucune autre autorité ne lui est supérieure.

 

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Enjeux

• Cet article cherche à reformuler cette affirmation de l’anabaptisme : la différenciation entre l’Église et l’Etat, et la nature de la loyauté que les chrétiens doivent aux gouvernements de ce monde. En effet l’Entente fraternelle de Schleitheim (1527) demande une séparation radicale (Absonderung) d’avec le monde et exclut toute participation chrétienne à des fonctions publiques. Aujourd’hui, tout en maintenant la différenciation entre l’Église et les structures politiques, nous sommes appelés au discernement et à la réflexion en vue d’un engagement éventuel dans la vie de la cité. 

• Nous sommes aussi invités à considérer la dimension politique de l’Église en tant que peuple de l’alliance, vivant sous l’autorité du Christ, et appelé à annoncer et à vivre le règne de Dieu.

 

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Commentaire

I- L’utilisation du terme « nation sainte » pour parler de l’Église peut paraître inhabituelle. Nous avons souvent spiritualisé le langage politique du Nouveau Testament en oubliant que les mots « royaume », « Seigneur », et même le mot grec pour « Église » (littéralement « assemblée » ou « rencontre urbaine ») sont tirés du domaine politique. Le terme « politique » se réfère ici à la structuration des relations sociales. Considérer l’Église en tant que nation nous aide alors à comprendre ses relations avec les autres nations du monde.

Avant le 4e siècle, époque de l’empereur Constantin, la plupart des chrétiens se considéraient comme étant la nation de Dieu, peuple composé de païens et de juifs convertis, vivant parmi les nations et pourtant étrangers au milieu d’elles (1 Pi 1,11 - 17 ; Hé 11,13 - 16). Lorsque le christianisme devint religion d’Etat, l’empereur s’imposa en tant que protecteur de la foi, même par la violence. L’adhésion à l’Église cessa alors d’être une décision personnelle. Les efforts missionnaires s’orientèrent principalement vers les personnes extérieures à l’empire. Aujourd’hui, dans un état laïque le gouvernement s’engage par sa constitution à respecter la liberté religieuse de ses citoyens.

Nous croyons que le Christ est Seigneur sur toute notre vie. L’Église et l’Etat sont des structures distinctes et elles peuvent avoir des positions antagonistes. Seule notre loyauté à l’égard du Christ doit être absolue. Nous comprenons que les gouvernements peuvent maintenir l’ordre et que nous devons rendre honneur à ceux qui y travaillent. Mais nous devons craindre Dieu seul (1 Pi 2,17). Lorsque les exigences gouvernementales sont en désaccord avec les exigences divines, les chrétiens doivent « obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5,29).

II- Dieu désire une seule chose pour chacun de nous : notre salut et notre intégration au peuple de Dieu. Les nations territoriales et leur gouvernement ne peuvent que partiellement accomplir la volonté divine car ils font appel à la violence, du moins en dernier ressort. Parfois même, ils usurpent leur pouvoir en cherchant à se mettre à la place de Dieu. Cependant, un gouvernement qui agit avec une justice relative et qui fait régner l’ordre est préférable à l’anarchie ou à un gouvernement injuste ou oppressif. En vertu de valeurs ou de principes plus élevés, les chrétiens peuvent inciter les autorités et l’Etat à agir d’une manière plus proche de la volonté de Dieu. Les chrétiens sont tenus de témoigner aux gouvernements, non seulement en qualité de citoyens d’une nation spécifique mais aussi en reflétant l’amour universel du Christ et en proclamant sa souveraineté sur toute institution humaine.

III- Le chrétien a besoin de l’Église pour l’aider à discerner comment être dans le monde sans se laisser influencer par les manières de faire du monde (Jn 17,14 - 19), tant sur certaines questions politiques que sociales. L’Église se pose des questions telles que : « Est - ce que le fait de participer au gouvernement ou à d’autres institutions nous permet d’être ambassadeurs de la réconciliation en Christ ? » ou « Telle participation va - t - elle compromettre notre fidélité au Christ ? ». Ces interrogations surgissent lorsque nous sommes confrontés à des questions d’ordre pratique : obligations militaires, direction d’entreprise, participation à une entreprise privée aux vastes ramifications, emplois au niveau du gouvernement et du système économique, exigences posées par une organisation, choix électoraux, utilisation des impôts, confrontation au système judiciaire, salut au drapeau, serment de fidélité, système scolaire public et privé, recherche d’influence sur le plan législatif… Il convient également de s’interroger sur nos silences et sur les conséquences que peut avoir notre non - participation à certaines actions. Notre discernement doit donc s’exercer négativement (en prenant garde aux actions auxquelles nous nous associons) et positivement (en discernant les lieux où notre présence et notre action sont irremplaçables).

 

Notes

1- 1 Pi 2,9
2- Ph 3,20 ; Ep 2,19
3- Ap 7,9
4- Rm 13,1 - 7
5- Ez 28 ; Dn 7 - 8 ; Ap 13
6- 1 Tm 2,1 - 4
7- Mt 5,13 - 16 ; Es 49,6
8- 2 Co 5,20
9- Jr 29,7
10- Col 2,15

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