Les couleurs de la grâce

 In Christ Seul

« Soli Deo Gloria ! » Comme J.S. Bach, Fra Angelico (1395-1455) aurait pu signer toutes ses œuvres par cette affirmation : « Pour la seule gloire de Dieu. »

En effet, ce peintre de la Renaissance italienne alliait un talent d’une rare intensité et sobriété à une grande ferveur spirituelle. Pour lui, peindre était un acte de prière ! Il ne commençait aucune œuvre sans avoir d’abord prié. Souvent, il peignait à genoux, en particulier lorsqu’il représentait avec émotion Jésus en croix. Il a toujours refusé renommée, gloire et richesses : Soli Deo Gloria ! Il peignait pour transmettre la foi et accordait ainsi une fonction didactique à son art. C’est pourquoi il n’a peint que des sujets bibliques, dont l’Annonciation, qu’il a représentée à plusieurs reprises.

L’Annonciation de Fra Angelico

L’ANGE ET LA JEUNE FILLE

L’Annonciation exposée au Musée du Prado à Madrid (1420) est riche en détails symboliques. L’ange Gabriel, vêtu de rouge, symbole de l’autorité divine dont il est le messager, s’adresse à Marie, assise dans une loggia à colonnades, ouverte sur un jardin clos, ici par un rideau de verdure, symbole de la virginité de cette jeune fille juive, choisie par Dieu pour accueillir dans son sein le Sauveur.

Son attitude, les bras croisés sur la poitrine, la tête inclinée, exprime son humilité et sa soumission à Dieu, au message apporté par l’ange. Elle est vêtue d’un manteau bleu qui fait écho à la voûte étoilée de la loggia, évoquant le ciel. Ainsi s’établit une relation entre Dieu et Marie, en laquelle le Fils de Dieu va s’incarner. Selon les codes de l’époque, le bleu est symbole de confiance dans la fidélité de Dieu.

UNE HUMBLE SERVANTE

Le manteau de Marie est bordé d’un col vert, symbole d’espérance. Au Moyen-Âge, cette couleur exprimait l’espérance de la femme enceinte. En effet nous voyons, dans un trait de lumière émanant des mains de Dieu, le Saint-Esprit descendre sur Marie qui, dès son acceptation du plan divin, recevra dans son sein le Fils de Dieu.

Elle est fiancée à Joseph, qui ne l’a pas encore connue. Son regard exprime étonnement, crainte, mais aussi humble soumission.

Elle accepte l’opprobre qui peut s’abattre sur elle. « Je suis l’humble servante du Seigneur. Que sa parole s’accomplisse pour moi » (Lc 1.38). Elle connaît les Écritures, le livre posé sur ses genoux est peut-être ouvert au chapitre 6 du prophète Ésaïe, représenté dans le médaillon au-dessus de la colonne qui s’élève entre l’ange et Marie. Cette colonne symbolise Jésus qui vient du ciel et s’incarne dans le monde, l’immanence du divin dans l’humain, la réalisation du plan du salut prévu par Dieu depuis la Chute.

L’IRRUPTION DE LA GRÂCE

En haut à gauche du tableau, le peintre représente Adam et Ève comme s’ils sortaient du tableau, pour évoquer leur expulsion du jardin d’Éden. Un ange garde le chemin de l’arbre de vie (Gn 3.2). Est-ce l’arbre au centre, avec les larges feuilles, ou l’arbre qui s’élève au-dessus de tous les autres, traversé par le rayon de lumière divine qui, à travers Marie, apportera la Vie dans le monde par l’incarnation de Jésus et sa victoire à la croix ?

Dernier petit détail symbolique – parmi d’autres non retenus ici –, l’hirondelle, messagère du printemps, posée sur un tirant au-dessus de Marie, évoque le temps nouveau qui s’ouvre pour l’humanité, le temps de la grâce qui s’accomplira à la croix.

Soli Deo Gloria !

 

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