Des champs à débroussailler
Nos existences saturées de biens, de divertissements et de notifications en viennent à ressembler au terrain épineux de la parabole du semeur. Au risque d’étouffer la Parole.
ACHETER DE L’ENCOMBREMENT
À plusieurs reprises, le PDG de Netflix a expliqué que la principale concurrence pour son entreprise n’était pas les plateformes comme Amazon Prime, mais le sommeil de ses clients¹. S’abonner à Netflix, c’est acheter un service d’encombrement de notre temps. De manière générale, acheter, c’est encombrer son espace, son temps, son budget et ses pensées, en échange d’un service. Prises séparément, toutes ces choses ne sont pas nécessairement mauvaises. Elles peuvent même être très bonnes. Mais dans nos vies bien remplies, chaque ajout mérite d’être perçu comme un encombrement potentiel de notre espace, de notre temps, de notre budget et de nos pensées. À partir d’un certain niveau, il faut s’arrêter pour évaluer les dégâts causés par l’encombrement de nos vies.
DES POSSESSIONS ÉPINEUSES
Dans la parabole dite du semeur (Luc 8.4-21), Jésus décrit la Parole semée sur différents terrains, plus ou moins fertiles. Cette parabole est une mise en garde relative à la manière dont nous écoutons cette Parole et sur les conséquences que cela a sur les fruits qu’elle porte (ou ne porte pas). Les deuxième et troisième terrains décrivent des personnes qui accueillent positivement le message du Royaume, sans pour autant qu’il porte du fruit. Sur les rochers, les attaques sont frontales. Ce sont les détresses et les persécutions qui ont raison de la croissance des graines. Dans le dernier terrain, la menace vient au contraire de choses attrayantes : « Ce qui est tombé parmi les épines, ce sont ceux qui, après avoir entendu, sont étouffés en cours de route par les inquiétudes, les richesses et les plaisirs de la vie, et ne donnent pas de fruits mûrs² » (Luc 8.14).
« Les inquiétudes, les richesses et les plaisirs » ne sont pas à voir comme une liste de trois éléments indépendants, mais comme trois aspects de notre attachement à ce que notre monde a à nous offrir. Les richesses sont le moyen d’obtenir ce que nous désirons, les inquiétudes sont la crainte de les perdre, ou de ne pas parvenir à les obtenir, et le plaisir est ce que nous attendons des choses que nous désirons. Autrement dit, les choses que nous désirons peuvent être bonnes, mais dans notre course pour obtenir ce que nous désirons, nous prenons le risque d’étouffer ce qui a vraiment de la valeur.
L’HEURE DU DÉBROUSSAILLAGE

Crédit : Luca Laurence
Pour permettre à la Parole de porter de bons fruits dans nos vies, nous avons donc besoin d’évaluer ce qui, dans nos vies, ressemble à des épines et ce qui ressemble à du terreau. Très concrètement, je vous invite à faire l’inventaire de tout ce que vous avez, dans votre logement, dans votre agenda, dans votre téléphone, dans vos dépenses sur votre compte bancaire, et à vous poser les questions suivantes :
Quelle place cela prend-il dans mon logement ? Dans mon emploi du temps ?
Dans mon budget ? Dans mes inquiétudes ?
Est-ce que cela m’aide à aimer Dieu et à aimer mon prochain ?
Ou est-ce une distraction qui m’éloigne de l’essentiel ?
L’objectif n’est certainement pas de ne garder qu’une bible et de brûler tout le reste, mais de recréer de l’espace pour ce qui compte vraiment. Pour reprendre l’exemple avec lequel nous avons commencé : est-ce que cela signifie qu’il faudrait bannir les plateformes de vidéo à la demande ? Pas forcément. Mais la question est plutôt : est-ce que je dépense tout mon temps libre devant Netflix, Amazon Prime ou Disney+ sans laisser de place aux choses qui comptent, à commencer par mon temps avec Dieu et avec mes proches ?
REVENIR À L’ESSENTIEL
Pour faire de la place à ce qui compte, nous devons nous attaquer à ce qui encombre nos vies. Comme le dit le pasteur John Mark Comer : « L’objectif n’est pas seulement de désencombrer votre placard ou votre garage, mais de désencombrer votre vie. De vous débarrasser de la myriade de distractions qui aggravent notre anxiété, nous abreuvent d’un flot incessant de bêtises abrutissantes et nous empêchent de nous concentrer sur l’essentiel³. »
Faisons de la place pour aimer Dieu et notre prochain.
¹ www.entrepreneur.com/business-news/netflix-our-biggest-com-petitor-is-sleep/293004
² Voir également Luc 21.34-36.
³ John Mark Comer, The ruthless elimination of hurry: how to stay emotionally healthy and spiritually alive in our current chaos, London, Hodder & Stoughton, 2019, page 181

