Conciliables ?
Comment concilier au quotidien vie de famille et vie en Eglise ? La question se pose pour tout membre d’Eglise ayant une famille à charge, et plus particulièrement pour les personnes engagées dans un ministère d’ancien, de prédicateur, de diacre… ou d’autres services encore. Eléments de réponse et témoignage.
Qui ne s’est senti un jour écartelé entre ses obligations d’Eglise et les attentes de sa famille ? Se mettre au service du Seigneur implique parfois de consacrer beaucoup d’heures à des activités bonnes en elles-mêmes, mais qui nous privent des joies du foyer. Comment trouver l’équilibre pour vivre sereinement nos différents engagements dans un lieu comme dans l’autre ?
L’ÉGLISE D’ABORD ? LA FAMILLE D’ABORD ?
Pendant longtemps, le maître mot entendu lors des consécrations de serviteurs était « l’Eglise d’abord ». Depuis quelques années, il est plus fréquent d’insister sur la nécessité de placer « la famille d’abord ». Et la Bible elle-même peut nous laisser perplexes par des textes difficilement conciliables. Aux paroles de Jésus : « Et quiconque aura quitté, à cause de mon nom, maisons, frères, soeurs, père, mère, femme, enfants ou terre recevra beaucoup plus et héritera la vie éternelle » (Mt 19,29), répondent celles de Paul : « Si quelqu’un n’a pas soin des siens, surtout de ceux de sa famille, il a renié la foi et il est pire qu’un infidèle » (1 Tim 5,8).
QUELQUES PISTES
Voici quelques pistes pour essayer de vivre un peu mieux ce dilemme.
1. Se poser de temps en temps la question des motivations. Pour quelles raisons me suis-je engagé dans ce service ? Est-ce vraiment le Seigneur qui me l’a demandé ? Est-il adapté à ma disponibilité ? Ne prend-il pas trop de mon temps ?
2. Dialoguer, avoir de la souplesse et s’adapter aux circonstances. Ce qu’il est possible de faire avec des enfants en bas âge ne peut plus être imposé aux adolescents. Régulièrement, il peut être utile de parler en famille pour savoir comment chacun vit l’engagement du ou des parents.
3. Se souvenir que la vie d’Eglise est un travail d’équipe. Si pendant une période, ma situation familiale demande davantage de mon temps, des frères et soeurs peuvent certainement me soulager dans mon service. La collégialité est une richesse inestimable.
4. Privilégier la qualité plutôt que la quantité. Beaucoup d’enfants réclament surtout des moments de qualité avec leurs parents : on peut être à la maison, mais plongé dans ses soucis, son journal ou Internet. Les enfants ont besoin de savoir que nous sommes capables de leur accorder la même attention qu’aux frères et soeurs de l’Eglise. Passer du temps ensemble pendant les vacances, réserver des week-ends seront l’occasion de vivre des expériences inoubliables.
5. Montrer les richesses de la famille et de l’Eglise sans les opposer. L’une et l’autre sont des lieux de service, d’adoration et de fêtes. Nous pouvons montrer à nos enfants que la vie familiale est belle, mais que savoir s’ouvrir aux autres, s’occuper de personnes isolées est une source d’enrichissement. L’Eglise, c’est la famille élargie avec qui il fait bon passer du temps, mais pas tout notre temps !
SAGESSE POUR ÉQUILIBRISTES
Le Seigneur, parmi ses nombreux bienfaits, nous a donné une famille et une Eglise. « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés », cet appel de Jésus est valable dans toutes les circonstances de notre vie et auprès de tous ceux qui nous entourent. Nous pouvons lui demander sa sagesse pour trouver le juste équilibre entre nos différents lieux de service, famille, Eglise et autres !
FILS D’ANCIEN DEVENU PASTEUR ET PÈRE… – TÉMOIGNAGE
Voici mon vécu d’enfant avec des parents engagés dans l’Eglise, moi qui suis maintenant engagé à temps-plein pour l’Eglise et père à mon tour.
Ce que je peux dire, c’est que l’engagement de mes parents ne m’a pas « dégoûté » de l’Eglise ! La preuve, je suis devenu pasteur… Certes, il y a eu des périodes où Papa était souvent absent le soir, et je me serais peut-être parfois senti plus libre de faire des bêtises à l’école du dimanche, si la monitrice n’avait pas été ma mère ! Mais bon, voilà, c’était comme ça, et ce serait hypocrite de ma part de dire que je l’ai mal vécu.
Je crois que mes parents ont su protéger notre famille, ne pas nous faire sentir à mes frères et à moi-même le poids et les soucis de l’Eglise. Je ne suis pas sûr d’y arriver toujours aussi bien avec mes propres enfants aujourd’hui…
Si je regarde en arrière, je me rends compte de l’importance toute particulière des vacances en famille : des temps forts, qui ont permis d’en compenser bien d’autres, quand les circonstances étaient peut-être un peu moins drôles. Et, sans vouloir paraître trop « traditionaliste », je me dis aussi que la présence de Maman à la maison n’a sans doute pas été étrangère au fait que nous n’ayons pas plus souffert des absences paternelles pour cause de réunions d’Eglise.
Que dire, encore ? J’espère ne pas faire sentir à mes enfants plus que ce que mes parents ne m’ont fait sentir. La tentation la plus grande pour moi est de tirer toujours plutôt sur la corde familiale, en me disant que je pourrai rattraper le temps plus tard … Mais le temps ne se rattrape pas.
Denis K.