CLICHÉ

 Dans Christ Seul, Explorer

Cliché-2014-07RLes « clichés » sur les autres, sur le monde, sur soi, sur Dieu, limitent notre perception…Exemple avec un « cliché » pris en photo… (!)

Les « clichés » sur les autres, sur le monde, sur soi, sur Dieu, limitent notre perception…Exemple avec un « cliché » pris en photo… (!)

Alors que je me promène dans une petite station balnéaire du nord de l’Espagne, je tombe sur cette scène peu banale m’offrant une image dans l’image ! Un marchand ambulant, installé là pendant l’été, a fait reproduire, au dos de son installation, la photo que je suis précisément en mesure de prendre, du point où je me trouve. Cette photo est la marque de fabrique du lieu. Si vous tapez le nom de cette ville sur un moteur de recherche d’images, vous tomberez tout de suite sur cette perspective. C’est la photo de vacances type : celle que l’on prend, à tout hasard, à titre de souvenir, en passant par là. La vieille église et le château sont les deux monuments remarquables du site. Ils appartiennent à un petit centre ancien qui se visite, habituellement, alors que le reste de la ville présente une architecture plutôt ordinaire.
Y a-t-il un brin d’humour dans le choix du marchand ambulant ? C’est possible. Je ne me suis pas entretenu avec lui. Il a peut-être été frappé de voir toutes les personnes passant par là s’arrêter, pour sortir leur appareil photo ou leur téléphone portable de la poche et immortaliser la scène. Il a alors adressé un clin d’œil à tous les passants : oui, je sais, c’est la photo que vous avez envie de prendre.

Conformisme du regard

Ce genre d’image est ce que l’on appelle un « cliché ». C’est-à-dire une image 100 fois ressassée, répétée, citée, reproduite, sans plus de réflexion. Qu’est-ce que chacun gagne à prendre, dans le même ordre d’idée, une photo de la tour Eiffel, d’une cathédrale connue, ou de la promenade des Anglais à Nice ? Il gagne le plaisir de mettre ses pas dans les traces de tous ceux qui l’ont précédé. La tour Eiffel, pour rester sur cet exemple, est dépourvue de toute esthétique (elle a, d’ailleurs, été considérée comme un édifice très laid par les Parisiens, quand elle a été montée). Pourtant, des milliers de personnes la photographient tous les jours, parce que des millions d’autres l’ont déjà immortalisée avant eux. Pour des gens qui viennent du bout du monde jusqu’à Paris, il est normal de revenir avec, au moins, une image de la tour Eiffel à montrer à leurs amis. Ils pourraient se contenter d’acheter une carte postale (et l’image serait souvent de meilleure qualité), mais avoir produit l’image soi-même ajoute une valeur supplémentaire.

Limitation du regard

Mais le « cliché » produit des effets au-delà de sa reproduction. Il oriente le regard. Ce panneau, planté là sur cette place, nous rend attentifs au fait que nos yeux sont comme aspirés par ces deux bâtiments et que nous ne voyons rien d’autre. En agrandissant la photo, je me rends compte que toutes les personnes qui sont en bord de mer ont les regards rivés vers ces bâtiments et que nombre d’entre elles se sont assises, pour ce faire, à un endroit assez peu accueillant : en bord de rue, là où passent toutes les voitures.
C’est là que le cliché pose problème : il limite notre perception. Lorsque je suis à l’étranger, j’aime bien, moi aussi, aller voir des lieux réputés. Lorsque je tente une photo, je prends, en général, plutôt un détail que l’ensemble, mais il n’empêche que je n’ai pas de problème à reproduire une image que d’autres ont, sans doute, déjà prise. C’est après que la question commence : est-ce là tout ce que nous voyons du lieu que nous visitons ? Sommes-nous capables d’élargir notre vue ? Même lorsqu’on visite un endroit pour la première fois et que l’on manque de points de repère, il existe une pluralité de manières de le regarder.
Je trouve que c’est une parabole qui dit quelque chose d’important sur notre manière d’aborder notre vie de tous les jours. Est-ce que nous enfermons notre perception des autres dans des schémas rigides, dans des clichés, dans des lieux communs, des vérités toutes faites ? Ou bien est-ce que nous sommes sensibles aux autres avec leur singularité ? Est-ce que nous sommes prêts à nous laisser surprendre par les événements ?

élargir notre perception

Dans les évangiles, Jésus répète : « Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ! » (Mt 11.15 ; 13.9 ; Mc 4.9 ; 4.23 ; 7.16 ; Lc 8.8, etc.). On trouve, également, des formules semblables à propos des yeux. Accueillir l’évangile suppose d’élargir notre perception habituelle. Cette perception est mise en forme par tous les clichés que la société autour de nous a construits. Sortir de cette mise en forme, signifie ne pas se con-former à ces images qui passent en boucle et qui obscurcissent notre regard.
Il faut, pour cela, être capable d’une mise en perspective semblable à celle qu’offre cette image : je sais bien que, dans ces circonstances, on a tendance à dire, voir, penser que, etc., mais je dis, vois, pense, autre chose. Et, dans cet inattendu du regard que l’on accueille, il y a cette singularité d’une parole qui nous est adressée et qui nous ouvre à la vie.

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