500 ans des réformes – Réformer l’image de l’Église par la vérité et l’amour
Sixième article de cette série, par Marc Kuhn, pasteur jeunesse des Eglises mennonites de France.
S’il y a une réforme dont l’Église aurait besoin, c’est de faire évoluer son image auprès de la société actuelle. En France en tout cas, on ne peut pas dire qu’aujourd’hui les Églises ont bonne presse, et cela, quelle que soit leur étiquette confessionnelle. Selon un sondage réalisé par Odoxa en 20161, une majorité de Français (56 % contre 43 %) a une mauvaise image de l’Église catholique. Toujours selon cette même étude, l’Église en question apparaît à la fois « très/trop conservatrice » (83 %), « trop éloignée du quotidien des Français » (64 %) et « pas transparente » (81 %). L’Église catholique c’est vrai est malheureusement entachée entre autres de scandales sexuels, mais les Églises luthéro-réformées et évangéliques n’ont pas forcément une bonne image pour autant : austères ou sectaires, voilà parfois ce qu’on peut aussi penser d’elles.
Beaucoup trop d’a priori collent encore à la peau de l’Église. En tant que chrétiens, nous devons avoir l’honnêteté de reconnaître que, parmi ces a priori, certains sont malheureusement justifiés et encore en accord avec la réalité. L’histoire proche ou lointaine de nos Églises a souvent aidé à enraciner profondément cette image négative jusqu’à aujourd’hui dans l’imaginaire collectif et parfois même dans celui des chrétiens eux-mêmes.
L’image des Églises risque de rester négative, si le mot « Église » continue de rimer avant tout avec « bâtiment » ou avec « institution ». L’Église n’est-elle pas d’abord une communauté, celle des disciples de Jésus-Christ, prête à sortir de ses murs et de ses mauvaises habitudes, plutôt qu’un beau monument historique ou une organisation bien figée depuis des siècles ? L’Église se fait-elle connaître d’abord par ce magnifique message de la Bonne Nouvelle qu’elle porte, plutôt que par ses positions éthiques conservatrices ou ses valeurs humanistes ? L’Église se vit-elle au quotidien dans la réalité de la vie de tous les jours de la semaine ou n’est-elle qu’une simple occupation du dimanche matin pour des hommes et des femmes qui ne vivent pas la cohérence entre ce qu’ils prêchent et ce qu’ils vivent ?
Néanmoins, le tableau n’est pas toujours si noir. Et localement, de nombreuses Églises cherchent à faire tomber les a priori. Des Églises continuent de se réformer !
Eglise de témoins
Mais toutes ces réformes ne vont pas toujours dans le bon sens. Certaines communautés ont opéré des changements dans le simple but d’être plus attractives, plus jeunes ou plus modernes. L’Église ne doit pas se réformer seulement par des artifices, par des innovations, par l’apparence. La coquille doit être belle, c’est vrai, mais si elle est vide ou pourrie, sa beauté ne sera qu’une façade. Changer son image ou avoir une meilleure réputation ne doit pas être le but en soi et la mission de l’Église. L’Église est appelée à être témoin de Dieu dans le monde. L’Eglise doit se réformer pour faire la volonté de Dieu, pas pour faire plaisir aux hommes et aux femmes. L’Église doit se réformer en acceptant de se laisser transformer par le Saint-Esprit, pas en se figeant sur son expérience ou en faisant simplement « fonctionner » ses activités. Dieu ne change pas c’est vrai, mais son Eglise doit changer comme Dieu le veut. Si elle ne se laisse pas changer par lui, elle se meurt.
Le message et l’accueil de l’Église doivent rester pertinents aujourd’hui : « En disant la vérité, dans l’amour, nous croîtrons à tous égards en celui qui est la tête, le Christ. » (Ep 4.15). Vérité et amour doivent aller ensemble : voilà le premier pas à faire pour aller dans le sens d’une réforme continuelle.
Vérité de la Bible
L’élément déclencheur des Réformes du 16ème siècle a été la redécouverte et la diffusion du texte biblique. Encore aujourd’hui L’Église doit redécouvrir la Bible et la diffuser par les nouveaux moyens qui s’offrent à elle. Elle doit accepter de se laisser surprendre, interpeller et nourrir par la Bible. À travers elle, l’Église doit chercher à écouter Dieu et à discerner sa volonté pour aujourd’hui. L’Église doit donc remettre en question son fonctionnement, ce qui implique que toute pratique d’Eglise en décalage avec les enseignements de la Parole de Dieu doit être réformée. Elle ne doit pas édulcorer ce message, elle doit annoncer toutes les bonnes nouvelles : même celles qui ne sont pas particulièrement agréables… L’Église doit donc continuer à oser à prêcher la vérité, peut-être d’abord pour elle-même, tout autant qu’en dehors de ses murs. L’Église doit se (re)passionner pour la lecture de la Bible, pour communiquer cette même passion aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui.
Amour et accueil
Cette vérité ne pourra être entendue et acceptée que s’il y aussi de l’amour : l’Église doit réformer son accueil. Accueillir, ça ne signifie ni se compromettre, ni tout accepter. C’est simplement montrer que l’Église est faite d’abord d’enfants de Dieu, qui sont conscients de leur imperfection, qui dépendent de la grâce de Dieu, mais qui décident aussi de le suivre et de lui obéir. L’Église n’est pas composée de spécialistes ou d’initiés, mais d’enfants spirituels en croissance.
Chacun doit donc se sentir la liberté de venir à l’Église comme il est… sans se poser la question de son éventuel code vestimentaire ou social, sans avoir peur de déranger si leurs enfants font du bruit, sans s’imaginer qu’il pourrait peut-être s’y ennuyer…
L’Église doit donner envie de venir rencontrer un Dieu vivant, libérateur et fidèle dans son amour.
Marc Kuhn, pasteur jeunesse des Eglises mennonites de France
Note