La ‘violence’ de Dieu

 Dans Christ Seul, Stimuler

Le Dieu de la Bible est-il violent ? Si l’on répond oui, comment comprendre cette violence de Dieu ? Et surtout, quel devrait être le rapport entre la violence de Dieu et le comportement des chrétiens ?

Le thème de la « violence » de Dieu ne peut guère échapper au lecteur tant soit peu attentif de la Bible. Il suffit de penser aux guerres dans l’Ancien Testament, ou bien aux descriptions de la colère et du jugement de Dieu.
Prenons l’exemple du livre de l’Apocalypse (voir l’extrait ci-dessous).
Comment ne pas faire un lien entre ces textes et la description suivante de la prise de Jérusalem lors de la première Croisade (1099)
… « Le vendredi, de grand matin, nous donnâmes un assaut général à la ville sans pouvoir lui nuire et nous étions dans la stupéfaction et dans une grande crainte. Puis à l’approche de l’heure à laquelle Notre Seigneur Jésus-Christ consentit à souffrir pour nous le supplice de la croix, nos chevaliers postés sur le château… se battaient avec ardeur… A ce moment, l’un de nos chevaliers… escalada le mur de la ville. Bientôt dès qu’il fut monté, tous les défenseurs de la ville s’enfuirent des murs à travers la cité et les nôtres les suivirent et les pourchassèrent en les tuant et les sabrant jusqu’au temple de Salomon, où il y eut un tel carnage que les nôtres marchaient dans leur sang jusqu’aux chevilles… » 1
Deux questions importantes se posent ici. Quelle est la nature de la « violence » de Dieu et quel lien pouvons-nous établir entre sa « violence » et la violence des hommes ? Pour « résoudre » cette question, nous ne pouvons offrir que quelques pistes d’interprétation pour la Bible dans son ensemble.

L’INCARNATION COMME CLÉ DE LECTURE DE LA BIBLE

D’abord, l’histoire biblique du salut commence avec Adam, Abraham et Moïse, mais culmine avec l’Incarnation. Jésus est la plénitude de la révélation de Dieu et nous savons que Jésus enseigne et vit lui-même le don ultime de soi, le refus de rendre le mal pour le mal. Notre regard sur l’ensemble des données bibliques fera donc de la « Parole faite chair » la clé de lecture pour comprendre la « violence » de Dieu.
Dans son amour, Dieu préfère traiter avec nous par le moyen de l’Incarnation. Cependant, il ne veut pas d’hommages forcés. Dieu s’offre à l’humanité, mais ne s’impose pas. Déjà avec Adam et Eve, ses directives ont été accompagnées de la possibilité d’un refus. Cette possibilité est devenue réalité et le mal est venu profondément dérégler la création. Mais Dieu n’a pas pour autant abandonné l’humanité. Dans son amour, par le moyen de l’Incarnation, Dieu a réparé les dégâts, accomplissant lui-même ce que nous ne pouvions pas faire. Cependant, le refus demeure possible. L’amour de Dieu va jusqu’à la possibilité du rejet de la rédemption en Christ.

LA « VIOLENCE » DE DIEU, C’EST SA JUSTICE

Au sein de l’histoire concrète, le résultat du rejet est terrible. Et puisque Dieu est juste, dans sa toute puissance, il garde les moyens nécessaires pour faire face à ce rejet. Ceci nous amène à notre deuxième clé de lecture : si « violence » il y a en Dieu, elle n’est pas arbitraire. Elle reflète plutôt sa justice.
Si Dieu n’avait pas les moyens nécessaires pour faire face au refus humain de sa volonté et pour contrarier la méchanceté humaine, la violence dans l’Histoire serait vraiment absurde, car elle se trouverait en dehors de la providence de Dieu. Cependant, nous savons bien que la question de la justice n’est pas entièrement résolue au sein de l’Histoire humaine. Il y a bien des innocents qui souffrent et des méchants qui prospèrent. Sans eschatologie, la question ne peut être réglée. Sans eschatologie, il n’y a pas de justice. Notre troisième clé de lecture est donc ce lien entre la justice de Dieu et son jugement à la fin des temps.

LA JUSTICE DE DIEU ET LE JUGEMENT DERNIER

L’Apocalypse nous montre le lien entre la patience et la non-violence de Dieu, manifestée par l’Agneau immolé d’une part et par la nature eschatologique de son jugement d’autre part. Nous savons ainsi que Dieu est patient, que Dieu laisse le temps dans l’Histoire pour l’annonce de L’Évangile et pour notre réponse. Il laisse aussi l’occasion du refus au sein de l’Histoire. L’ivraie poussera avec le bon grain jusqu’à la fin. Autrement dit, c’est la nature eschatologique du jugement de Dieu qui est la « contrepartie » de sa patience et de son amour au sein de l’Histoire humaine, « contrepartie » nécessaire qui garantit sa justice.

LE JUGEMENT N’APPARTIENT QU’À DIEU…

Tout cela étant dit, une question fondamentale demeure : qui doit séparer la lumière des ténèbres, qui a le droit d’exercer la violence contre « la bête » et « le faux prophète » ? En réponse, suivant le Nouveau Testament dans son ensemble, l’Apocalypse ne voit que Dieu. Si le cheval blanc joue un rôle clé dans le processus du jugement, il ne se retrouve plus du tout dans les images du règne final. Là, c’est l’Agneau immolé qui se trouve au milieu du trône. Celui qui règne est celui qui a été crucifié. Son règne est légitimé non par l’épée du cheval blanc, mais par ses blessures.
Malheureusement, une bonne partie de l’histoire de la théologie et de la pratique chrétiennes affirme le contraire : si notre Dieu est « violent », nous aussi, nous pouvons l’être, nous pouvons nous ériger en juges, comme le texte des Croisades le montre. Cependant, nous avons ici la thèse de la plupart des religions ou des idéologies de l’Histoire humaine. Rien n’est plus sacré que le groupe, c’est-à-dire, notre groupe, notre existence. Le plus fort a raison.
Mais c’est Dieu seul qui est tout-puissant. Quand il est question d’imitation de Dieu dans le Nouveau Testament, il s’agit toujours de ce que nous voyons en Christ. Il y a des choses que seul Dieu peut faire. L’une de ces choses, c’est d’exercer le jugement. Quand nous sommes tentés de le faire, le Nouveau Testament nous renvoie sans cesse à Jésus. Ni le jugement final ni la vengeance ne nous appartiennent.
NOTE 1. “ Histoire anonyme de la première croisade ”, cité dans Jean Comby, Pour lire l’histoire de l’Eglise, Tome I, Des origines au XVe siècle, Editions du Cerf, 1984, p.163.

 

MANGER LA CHAIR DES ROIS…
« Venez, rassemblez-vous pour le grand festin de Dieu, pour manger la chair des rois, la chair des chefs, la chair des puissants, la chair des chevaux et de ceux qui les montent, la chair de tous les hommes, libres et esclaves, petits et grands.» APOCALYPSE 19, 17-18

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