Israël – Palestine (6) : histoire de droits

 Dans Blog, Israël - Palestine

Cette sixième entrée décrit la situation des Arabes israéliens, citoyens de seconde zone. Explications.

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L’essentiel de notre périple nous a amenés jusqu’ici à évoquer la situation des Palestiniens dans les Territoires occupés (terme consacré par l’usage palestinien). Nous rencontrons ce matin un responsable d’une association pour la jeunesse arabe à Haïfa pour évoquer la situation des environ 1,3 millions de Palestiniens ou Arabes d’Israël.

Citoyens de second rang
Quoique largement majoritaires en 1948 au moment de la création de l’Etat d’Israël, ils ne représentent aujourd’hui plus que 20 % de la population totale. L’immigration « juive » – le lien de certains de ces émigrés russes ou autres est souvent très ténu avec la judéité – et la pression sur les Palestiniens à émigrer dans les territoires voisins explique cette démographie défavorable. En réalité, ils étaient obligés de devenir citoyens israéliens s’ils voulaient rester près de ou dans leur village ou ville d’origine.
Citoyens certes mais de seconde zone ; la discrimination exercée à leur égard prend toutes sortes de formes.

Confiscation de terres
Très tôt après 1948, le gouvernement a voté des lois conduisant à confisquer les terres des Palestiniens, comme celle qui édicte que les terres sans propriétaires deviennent automatiquement propriété de l’Etat. C’est ainsi que des superficies considérables appartenant aux réfugiés (dans les Territoires) ou déplacés internes, avec interdiction de revenir dans leur village d’origine, ont été tout simplement confisquées. Ou alors, les terres sont déclarées zone militaire. Plus récemment, cette politique de confiscation des terres prend des allures plus modernes : les terres convoitées par l’Etat deviennent des réserves naturelles…
La discrimination inclut aussi des aspects économiques comme l’interdiction qu’ont les villes ou villages palestiniens d’implanter des zones industrielles ou artisanales, ou l’accès au crédit rendu plus difficile : les 20 % de Palestiniens ou d’Arabes d’Israël ont droit à 3 % du budget du Ministère de l’Economie.

Assimilation
Dans le domaine de l’éducation qui intéresse particulièrement notre orateur du jour, la discrimination commence par une politique d’assimilation : on exige des écoles qu’elles suivent le curriculum imposé comportant l’obligation, avec examen à la clé, d’apprendre l’hébreu, la religion et l’histoire juives, sans contre partie du coté arabe. La lecture de l’histoire du pays expose le point de vue sioniste exclusif. Le Département de l’Education Nationale héberge des services secrets chargés de vérifier que cette politique est effectivement mise en œuvre. Le maître qui dérogerait sera rappelé à l’ordre et harcelé voire démis. Cette pression continuelle fera rentrer rapidement les récalcitrants dans le rang.
Les moyens financiers alloués aux écoles arabes sont également proportionnellement insuffisants, avec comme résultat, des maîtres moins bien formés, des classes plus chargées et un niveau éducatif plus faible.

Service militaire
Les citoyens palestiniens d’Israël sont donc des citoyens de seconde zone, ce que reconnaissent volontiers les Juifs israéliens de gauche comme de droite. Mais si les premiers pensent qu’avec le temps le fossé entre Arabes et autres Israéliens pourra être comblé, la droite, elle, le justifie par le fait que les Arabes ne font pas le service national. Ils en étaient exemptés jusqu’en 2006, mais depuis, y sont fortement encouragés sans pour autant grand succès.
C’est là un des axes de travail de l’association qui nous reçoit : décourager la participation des jeunes au service national.
La première raison qui motive cette position parle à nos cœurs de mennonites objecteurs de conscience. Les jeunes recrues sont le bras armé de la politique sécuritaire de l’Etat : ils garnissent les centaines de « check points », miradors et autres lieux de harcèlement des Palestiniens des Territoires occupés. Ils sont automatiquement versés à l’effectif des armées en cas de crise.
Par ailleurs, ils rejettent l’argument de la droite qui voudrait que le service national soit le pendant du droit à la citoyenneté pleine et entière. Les droits de l’homme ne peuvent pas être conditionnés par un quelconque service à la nation. L’inanité de l’argument apparaît bien avec les contre exemples fournis par la société israélienne : rares sont les juifs ultra orthodoxes qui effectuent le service national ; ils ne sont pas pour autant lésés dans leur citoyenneté, bien au contraire. Les Druzes a contrario sont tenus à l’effectuer, mais n’ont pas les mêmes droits que les Juifs.
L’Etat d’Israël n’est pas laïque et tant que cela ne changera pas, nul besoin de s’illusionner en voulant paraître aussi bon citoyen que les Juifs.
Le dernier argument est que le service national comporte un lavage de cerveau visant à une soumission non critique à l’autorité en place et une dénégation de l’identité du Palestinien.

Boycott

Notre entretien se termine par une question : que faire pour vous aider, en tant qu’étranger ? Entrer dans le projet BDS : Boycott Désinvestissement Sanctions. A notre niveau, boycotter les produits d’Israël, sortir ses investissements (actions, obligations) d’Israël, et soutenir les sanctions internationales. Cette pression de l’extérieur pourra peut-être compenser le déséquilibre criant du pouvoir entre les parties et amener le gouvernement à des négociations honnêtes ; cela suppose la reconnaissance du fait de l’occupation et des l’égalité des droits des Palestiniens.
Daniel Goldschmidt

Photo : Ruedy Nussbaumer. Tag sur un mur à Bethlehem.

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