Couple : quand l’attirance devient dangereuse
L’être humain est un être de désir, aussi sur le plan sexuel.Comment gérer une attirance malsaine dans une société hyper érotisée ? Réflexions.
Même au désert, alors en ville !
Pour Jésus, au désert, les privations aiguisent les rêves et l’appétit. Satan tente de lui faire prendre des pierres pour du pain. Puis de renier son amour du Père pour de l’argent et du pouvoir. L’imagerie cérébrale nous permet de voir les zones du cerveau où se forment ces images (réelles ou imaginaires) tentatrices. Une zone basse du cortex frontal pour les appétits primaires (faim, soif, sexe) ; une zone plus haute pour argent et pouvoir. Le texte évangélique continue : « Ayant épuisé toutes les formes de tentation, le diable s’éloigna de lui pour revenir au moment opportun. » (Lc 4.13).La tentation au jardin des Oliviers n’est plus un désir, mais une peur, celle de souffrir et de mourir.
Deux systèmes cérébraux organisent notre action : celui de la recherche du plaisir et celui de l’évitement du danger. C’est toujours à partir de l’idée que l’on se fait des choses plutôt que de la chose elle-même que le désir ou la crainte nous envahit et nous pousse à agir. Le combat spirituel se situe dans l’équilibre de ces systèmes. Pour contrer un désir ou une peur malvenus, il faut leur opposer un désir plus fort et raisonnablement plus durable. Ce qui retient Jésus, c’est qu’il reste fidèle à ce qui fonde son être profond : son union avec le Père, et la mission que le Père lui a confiée.
Nous ne sommes pas au désert. La tentation est aujourd’hui continuelle dans la rue ou sur nos écrans. La pornographie s’étale, directement ou insidieusement dans la publicité, qui est un subtil détournement du désir sexuel vers l’achat de biens ou de services. Il faudrait sans cesse regarder ses pieds ou vivre en ermite, mais il nous resterait encore la puissance des images mémorisées !
Choisir ses pensées comme on choisit ses amis
Le contrôle des émotions passe par celui des pensées, qu’il faut bloquer dans les premières secondes quand elles sont indésirables, en leur ordonnant de sortir de soi comme si elles étaient des êtres étrangers. On racontait parmi les moines du désert que deux d’entre eux entendirent un frère parler seul dans sa cellule : « Allez-vous en, vous autres, disait-il, et venez à moi mes belles. » Ils lui demandèrent à qui il parlait : « Je chassais mes mauvaises pensées, et j’appelais les bonnes à mon secours. » Les pensées sont comme des amis, il faut les choisir. Comme par exemple de penser à ceux que l’on aime et à ce que le Seigneur attend de nous à court terme. Cette attention constante à suivre le chemin nous permet de ne pas céder : « Veillez et priez sans cesse, pour que vous n’entriez pas en tentation. » (Mt 26.41).
La Création est bien faite (Ge 1.31) ! Encore faut-il en user correctement. Nos gestes de tendresse et de paix envers notre prochain favorisent la production d’ocytocine, que les sexologues nomment l’hormone de la fidélité. Celle-ci régule à son tour les hormones de la peur et du désir. Elle nous rend bienveillants, confiants en nous et en autrui… et sexuellement fidèles ! Cela se vérifie expérimentalement sur les cobayes, animaux ou humains. Le respect et la tendresse pour autrui sont donc le meilleur antidote au désir malsain. à l’opposé, regardons les publicités de ce qu’on nomme le « porno chic », employé pour nous faire consommer des produits de luxe : nous n’y verrons guère de tendresse, mais plutôt du mépris pour les femmes.
Présence physique, imaginaire ou spirituelle
Pour vivre dans l’Esprit notre vie conjugale dans sa dimension affective et charnelle, comme l’auteur de la lettre aux éphésiens le propose, soyons tendres l’un envers l’autre. Soyons attentifs à notre conjoint quand nous sommes en présence physique, et quand il (elle) n’est pas là, rendons-le présent dans notre cœur en l’imaginant à nos côtés, et même en lui parlant. Remarquez que nous faisons ainsi dans la prière pour notre relation avec le Seigneur ! Les tentations sont beaucoup moins puissantes quand nous ne nous sentons pas seuls. L’amour de don (agapé) vient alors prendre le contrôle de l’éros.
Ce qui demande un effort de maîtrise de soi pour un couple l’exige tout autant pour une personne célibataire si elle veut vivre dans la continence pour le Royaume (Mt 19). Il existe donc une ascèse particulière pour les personnes seules : on peut vivre sans rapport sexuel, mais on ne devrait jamais vivre sans amour ni tendresse !
Pour aller plus loin…
[c]Olivier Florant, « Ne gâchez pas votre plaisir, il est sacré – Pour une liturgie de l’orgasme », Presses de la Renaissance, Paris, 2006, 238 pages[/c][titre]Hypersexualisation[/titre]
Chez les enfants, l’intrusion précoce de la sexualité entraîne des dégâts psychologiques irréversibles dans 80 % des cas. L’hypersexualisation participe au développement de conduites à risque et notamment à l’anorexie mentale pré-pubère (37 % des jeunes filles de 11 ans sont à la diète). L’industrie du divertissement pornographique pour adultes génère plus de 10 % de tout le trafic Internet dans le monde, soit quelque 3 à 5 milliards de dollars de chiffre d’affaires par an, et 25 % de la recherche en ligne concernent des sites au contenu érotique.
[titre]Rapport parlementaire de Chantal Jouanno – 2012[/titre]