L’actualité, l’histoire, et la durée

 Dans Christ Seul, Stimuler

Le témoignage chrétien après les attentats en France passe par le recul de l’histoire et l’engagement durable dans la rencontre. Point de vue.

L’actualité du moment

Les attentats qui ont frappé Charlie Hebdo et une épicerie casher nous ont laissés abasourdis. Au fil des conversations, les interlocuteurs que je rencontrais, voisins de palier ou collègues universitaires, dressaient le même constat : difficile de penser après ces événements tragiques ; tous nous avions l’œil rivé à l’écran pour suivre l’actualité. Besoin de parler, de se réunir aussi. Les manifestations, ponctuées par le rassemblement géant du 11 janvier, ont permis à un pays en deuil de vivre ce moment ensemble – même si une part du pays ne se sentait pas la bienvenue. Sur le moment, « Je suis Charlie » – mais aussi « je suis Ahmed, juif, policier » – a tenu lieu de mot rassembleur. Mais nous le savions, un vivre-ensemble durable ne peut s’établir sur un slogan forgé dans l’urgence.
Tous, nous sommes appelés à apporter notre contribution à ce vivre-ensemble, chacun selon son vécu, ses aptitudes, sa perspective. C’est une occasion de témoigner d’un désir de vivre en paix et, pour nous chrétiens, de dire combien le Christ constitue l’incarnation de cette paix.

Le recul de l’histoire

J’aimerais partager comment cela se traduit pour moi, espérant que mon expérience donnera des idées à d’autres personnes. J’ai la chance d’être enseignant et chercheur. Ce qui me donne du temps pour lire. Au cours des dernières semaines, je me suis plongé dans des ouvrages remarquables portant sur les rapports complexes de l’islam avec l’Occident, une histoire que j’ignorais presque entièrement. Je n’avais pas conscience de l’ampleur de notre dette à l’égard de la civilisation musulmane. J’ai mesuré alors combien l’amnésie peut conduire à la mécompréhension, aux raccourcis, au mépris.
Ce qui me ramène à la formule « Je suis… » qui, pour peu qu’on la décline autrement, pourrait être davantage qu’un slogan : « Je suis musulman », par exemple, pour aborder l’autre en se portant véritablement à sa rencontre. Cette rencontre peut être personnelle, mais je crois qu’elle doit aussi faire honneur à son histoire en s’intéressant à ce qui participe du passé de cette culture et de sa diversité contemporaine.
Mais pour pouvoir saisir l’autre dans son identité, je dois être au clair sur ma propre identité : « Je suis chrétien » – là aussi lucidement, en faisant le point sur la part d’ombre et de lumière qui marque l’histoire du christianisme.

La durée de la durée

Le premier pas vers l’autre consiste pour moi à faire place à la richesse de sa tradition, dont il peut ne pas avoir conscience – comme nous connaissons mal la richesse de notre tradition. Une étape nécessaire pour un dialogue accueillant et exigeant qui, pour avoir un effet durable, ne peut se suffire des sursauts de l’actualité, mais doit s’inscrire dans la durée.

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