Les conflits dans l’Eglise

 Dans Christ Seul

Voici un sujet qui fait plutôt fuir… Et si les conflits étaient l’occasion de progresser en maturité dans l’acceptation des différences normales et légitimes ? Point de vue d’un médiateur.

Dans toute vie collective apparaissent inévitablement des conflits. Pourtant, il y a une difficulté particulière à vivre cette réalité dans les communautés chrétiennes. Nous prendrons le mot « conflit » dans un sens très large, qui va de la tension non exprimée jusqu’au conflit ouvert.

NORMALITÉ DU CONFLIT

Le conflit n’est pas nécessairement l’expression du mal, du péché. Il est d’abord, et souvent, expression de la différence : nous n’avons pas les mêmes envies, les mêmes goûts, la même sensibilité, et ce dans tous les domaines : art, cuisine, réflexion, vie spirituelle. Et cette diversité peut amener toute sorte d’incompréhensions, de malaises, voire de frustrations.

Dans une collectivité, j’ai besoin d’exister et d’être reconnu pour moi-même : il me faut apprendre à me situer par rapport aux autres. Quand le fonctionnement collectif ne favorise pas cela, je vais trouver des stratégies pour répondre à ce besoin. J’utiliserai des circuits de communication informelle avec ceux dont je me sens proche, jusqu’à créer une sorte de clan avec eux. Peut-être prendrai-je la parole devant les autres, les rares fois où j’en ai l’occasion, avec une force, voire une agressivité hors de propos.

Certaines tensions naissent aussi à certains moments clés, par exemple quand il y a du changement. Le cas le plus évident est l’adolescence. L’ado change, ce qui déjà est perturbant. Mais surtout, il veut changer son rapport aux autres, se situer différemment par rapport à eux, quitter l’enfance pour autre chose. Il n’est pas facile pour son entourage, surtout ses parents, de s’adapter. Il y a souvent des tensions, des désaccords parfois violents, au moins dans leurs expressions.

Il y a aussi des conflits plus directement liés à des motivations et des attitudes mauvaises : lutte pour le pouvoir, conceptions chrétiennes erronées, jalousie… Cependant, de même que dans les conflits « normaux » il y a inévitablement influence du péché, il y a aussi des aspects non condamnables dans les attitudes a priori les plus négatives. On dit qu’un tel se bat pour le pouvoir, mais derrière, il y a un besoin de reconnaissance qui n’a jamais été pris en compte. Telle personne explose lors de l’Assemblée Générale, mais s’il y avait eu auparavant plus d’espace pour communiquer, les choses se seraient peut être passées différemment. Ici, comme en Actes 6, le conflit révèle un problème de fonctionnement et permet ainsi de le traiter.

Ce ne sont pas la tension et les conflits qui sont mauvais, ce sont la violence et le refus de laisser sa place à l’autre qui viennent pervertir le conflit.

Photo : www.freeimages.com

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LE REFUS «CHRÉTIEN» DU CONFLIT

Ce refus s’observe dans toutes les Églises. Partout l’on retrouve cette idée que la communauté chrétienne, si elle est fidèle, ne devrait pas connaître de conflits. La paix du Christ devrait régner dans les cœurs et dans les relations. Derrière l’expression de ces valeurs de paix, tout se passe comme si l’on projetait sur l’église une utopie d’harmonie, de chaleur, d’espace protégé…

Mais cette image d’harmonie correspond-elle à ce que nous lisons dans le Nouveau Testament ? En Actes 6 et 15, nulle part il n’est reproché aux Hellénistes ou à Paul et Barnabas d’être entrés en conflit. Bien au contraire, la protestation des Hellénistes fut acceptée et l’injustice commise à leur égard fut reconnue et traitée.

Mais que faire alors des condamnations de conflit présentes sous la plume de l’apôtre Paul, notamment dans 1 Co 1-3 ? D’abord, souligner que Paul n’affirme nulle part qu’il ne devrait pas y avoir de tensions, de désaccords, de conflits dans l’Église. Ce qu’il condamne, ce sont les clans, les factions qui s’organisent comme telles. Ce qu’il met en évidence n’est pas tant le péché que l’immaturité spirituelle (1 Co 3.1-5). Et qu’est-ce qui manifeste cette immaturité ? D’abord une certaine dépendance envers les médiations humaines (Paul et Apollos) au lieu d’être relié directement et de façon autonome à Dieu. Ensuite, une incapacité à accueillir positivement la différence et à la vivre ensemble. Les ministères de Paul et d’Apollos étaient différents (1 Co 3.6), et les Corinthiens, au lieu de discerner la diversité d’action de Dieu, se sont polarisés sur un seul de ces modes d’action, dévalorisant de fait les autres.

La capacité à accueillir et à vivre ensemble en paix dans la diversité des opinions est la marque des chrétiens « accomplis » ; ceci est fortement souligné en Ph 3,17 : la diversité des avis n’empêche pas les chrétiens mûrs spirituellement de marcher « d’un même pas ».

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