La souffrance et la présence de Dieu

 Dans Christ Seul

Dans le livre juste paru « La souffrance, un chemin de vie ? » (voir ci-dessous), Linda Oyer s’adresse à toute personne confrontée à la souffrance physique, psychologique, morale, au handicap, au deuil, comme à ceux et celles qui l’accompagnent. Interview sensible.

Christ Seul : Dans ce livre, tu parles de l’épreuve et de la nécessité de maintenir ensemble deux réalités : la souffrance et la présence du Dieu qui donne vie et espérance. Dans quelles circonstances as-tu fait cette expérience paradoxale ?

Linda Oyer : En 2008, j’ai eu une toxoplasmose oculaire, puis un deuxième foyer en 2011. Le résultat était une vision de 0,5 sur 10 dans un œil et une baisse de vision dans l’autre. La lecture et les déplacements étaient devenus très problématiques.

C.S : Comment concilier la présence, parfois discrète, de Dieu au milieu de la souffrance avec les promesses de délivrance et d’exaucement qui elles aussi sont affirmées dans l’Écriture ?

Linda Oyer : Si « concilier » veut dire les rendre compatibles ou les mettre en accord, je n’essaie pas de le faire. Nous voyons ces deux réalités dans la Bible sans qu’elle nous explique de quelle manière les concilier. Le livre de Job, surtout le discours de Dieu à la fi n, aurait été un endroit idéal pour le faire. Il est difficile pour l’être humain de maintenir ensemble des positions paradoxales sans nier ni gommer la réalité de l’une au détriment de l’autre. Cela génère beaucoup d’incertitude et d’inconfort, car, dans cette vie, nous ne savons pas à quoi nous attendre : guérison ou non-guérison, amélioration de la situation ou détérioration.

C.S : Si nous ne pouvons pas changer nos circonstances, faudrait-il se résigner à la souffrance ?

Linda Oyer : La résignation est une attitude passive : « à quoi bon ? ». Je subis mes circonstances passivement, sans espoir. Je préfère parler de consentement, c’est-à-dire d’une manière d’accueillir ou d’« habiter » la situation. Il s’agit de chercher à vivre le « nouveau moi » dans des circonstances que je n’ai ni choisies ni ne peux changer. Cette acceptation de la réalité est active. Chercher à vivre, dans cette situation, la confiance, l’amour et l’espérance, des vertus éternelles, fait de nous des acteurs et plus des victimes.

C.S : Peux-tu donner un exemple ?

Linda Oyer : Je pense au Vietnamien Van Thuan qui était l’évêque de Saigon en 1975. Il a été emprisonné à cause de sa foi pendant 13 ans sans avoir été jugé ni condamné. Quand il a été emmené dans le Nord du Vietnam en bateau avec 1 500 autres prisonniers dans des conditions inhumaines, son attitude n’était pas la résignation. Il en est venu à considérer ces prisonniers comme sa nouvelle paroisse et a passé son temps à écouter leurs angoisses et leurs souffrances et à les réconforter.

Propos recueillis par Louise Nussbaumer

Pour aller plus loin…

Ce livre propose une approche spirituelle de la souffrance, illustrée par des exemples bibliques et inspirée d’un tableau des pèlerins d’Emmaüs reproduit en couverture qui sert de fil conducteur.
Des questions d’appropriation permettent un chemin d’intériorité. Un livre qui met des mots sur les maux et exprime une foi solidement arrimée au Dieu de la vie.
Linda Oyer, La souffrance, un chemin de vie ?, Dossier de Christ Seul 3/2016, Editions Mennonites, Montbéliard, 80 pages, 9 €.
A commander sur www.editions-mennonites.fr

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