Post-Chrétienté
À l’arrière-plan de l’off re de certains candidats à l’élection présidentielle de 2017 se trouve la défense des racines et des valeurs chrétiennes de la France. Ils le font pour (souligner la bonne réponse) : attirer des suffrages, préserver un héritage, défendre certaines valeurs, empêcher l’immigration…
L’histoire de la France est liée à l’histoire du christianisme. Il s’est établi au fil des siècles une situation de chrétienté, un régime favorisant le christianisme (il faudrait dire un christianisme…). Depuis la Révolution française, la mise en place de la laïcité et mai 1968, il en reste des vestiges, inscrits dans la culture, certaines lois et mentalités, des bâtiments… Faut-il défendre ces vestiges par une appellation chrétienne ?
LE PROBLÈME
Le problème de la chrétienté et de l’état d’esprit qui en reste est le suivant : le mot « chrétien » est alors associé à un pouvoir et à des décisions « politiques », basés sur la contrainte et en définitive sur la violence. Le gouvernement « très chrétien » de Donald Trump ne laisse pas d’inquiéter à cet égard… Quand le mot « chrétien » est lié à la conduite d’un État, le risque est grand, sauf exception, de provoquer le contraire de ce qui est visé : le rejet de ce qui est chrétien. Mieux vaut une bonne politique non étiquetée chrétienne qu’une mauvaise politique estampillée chrétienne.
TRANSITIONS
Dans un Dossier de Christ Seul à paraître en 2017, Stuart Murray, théologien anabaptiste britannique, décrit le contexte européen à l’aide du mot « post-chrétienté », une situation qui cohabite avec les restes de la mentalité de chrétienté. Ce qui implique des transitions en cours. Par exemple : « En chrétienté, les chrétiens se sentaient à l’aise dans une culture marquée par leur récit, mais en post-chrétienté, nous sommes étrangers, exilés et pèlerins dans une culture où nous ne nous sentons plus à la maison. » Ou encore : « En chrétienté, les chrétiens bénéficient de nombreux privilèges, mais en post-chrétienté, nous sommes un groupe parmi beaucoup d’autres dans une société plurielle. »
Les protestants et évangéliques en France, minoritaires de longue date, n’ont pas à craindre la post-chrétienté, même si les inconnues sont nombreuses. Dans ce contexte, le témoignage courageux de communautés chrétiennes agissant par le bas, posant les signes du monde à l’envers évoqué par les Béatitudes, est (in)attendu. Comme aux premiers temps de l’Église, avant la chrétienté…