500 ans des réformes – Recentrage sur l’essentiel

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12e article de cette série, par Claude Baecher, qui propose neuf pistes pour revenir à l’essentiel aujourd’hui.

La célébration des 500 ans des débuts de la Réforme m’a donné l’occasion de participer à plusieurs reprises à des tables rondes œcuméniques sur le sujet de la Réforme. Il s’agit bien entendu de ma perspective, elle n’est pas neutre et ouverte à la discussion.

En Occident, la fréquentation des cultes chrétiens est en très forte baisse, toutes Eglises confondues. De ce fait on voit de nouveau la différence entre ceux et celles qui sont attachés au Christ et ceux et celles qui ne le sont pas. Je sais qu’il existe des chrétiens anonymes qui ne participent plus à la communion concrète d’une Eglise et se disent toujours chrétiens. Je n’ai toutefois que peu d’espoir à moyen terme de les voir poursuivre leur vie de foi ou y inviter leurs enfants… La société catéchise fortement elle aussi… Revenir aux essentiels de la foi chrétienne est la réforme/restitution dont nous (l’Eglise) avons besoin dans notre temps : revenir à un Dieu créateur et aimant, à Jésus le Roi sauveur qui nous le fait connaître, à l’Esprit qui nous renouvelle, à une vie fraternelle qui suit le Christ dans sa résurrection. Les neuf pistes ci-dessous me paraissent aujourd’hui aller dans le bon sens.

1. RÉFORME OU RESTITUTION A LA BASE

Il m’est plus facile de dire qu’il faut une restitution permanente de l’Esprit et du commandement de Jésus dans l’Eglise, plutôt qu’une réforme de l’Eglise qui présupposerait que l’Eglise est uniforme et qu’elle a partout besoin d’un même recentrage. Sans doute cette approche révèle-t-elle une compréhension de type anabaptiste ou, disons, de la prime jeunesse des réformateurs. S’il me paraît évident de nos jours qu’il faut composer avec une solidarité de tous ceux et celles qui confessent la foi chrétienne, une réforme ou restitution de ce type commence par la base. La base, ce sont les personnes qui se réclament de Jésus le Christ, elles mêmes redevables à d’autres personnes qui les ont précédées et qui leur ont annoncé la bonne nouvelle de manière crédible et de diverses façons.

2. IDENTIFIER LES CORRUPTIONS

Pour toute réformation ou restitution, il faut être au clair au sujet des corruptions du message de Jésus qu’il s’agit de corriger. C’est sans doute là que l’aspiration de réforme doit débuter. Du point de vue des communautés de l’héritage anabaptiste, c’est lié au pouvoir servant ou asservissant. C’est recourir à la persuasion, à la confrontation aimante et respectueuse, mais jamais à la contrainte ou à la manipulation des consciences. Autrement dit, l’Eglise sera belle si elle reste libre, tant d’y adhérer que de la quitter. Après les guerres de religions, il n’y pas de chemin d’annonce de l’Evangile sans confession des errements vécus par la chrétienté ou autres formes justifiant le manque d’amour manifeste vécu dans le passé.

3. ECOUTER LA RÉVÉLATION DIVINE

Un retour aux sources les plus pures est nécessaire. Je présuppose que les auteurs bibliques ont été conduits par une révélation divine de la justice attendue. Une justice qui restaure, fruit d’un Dieu aimant malgré tout, et qui permet de vivre de manière responsable en société et dans la durée. Sans justice, pas de révélation. Une culture chrétienne s’attachera donc à rester en contact avec la narration biblique. Quel que soit le mode de transmission, le contenu de la Bible doit être connu. Ce contenu inclut les hauts faits de Dieu depuis la création, dans le peuple hébreu, les promesses d’un roi-sauveur, la venue de Jésus, la Pentecôte, la mission du peuple de Dieu, l’attente d’un rétablissement universel lors de la venue en gloire du Christ.

4. REVENIR À LA BONNE NOUVELLE D’UN CRÉATEUR ET D’UNE CRÉATION

En Europe, l’idée même d’un Dieu créateur est devenue floue, ouvrant largement les voies au matérialisme, à la pensée magique ou ésotérique, à la méconnaissance du statut de l’humain, image de Dieu, gestionnaire de la création. L’existence d’un Dieu unique créateur de tout ce qui existe – à part le mal – est une dimension libératrice qu’il convient de renforcer dans les Eglises, comme dans l’évangélisation en terres polythéistes des premiers siècles. Il faut souvent revenir à cet élément fondamental lorsqu’on veut palier en profondeur à l’absence d’espérance, caractéristique de la société post-moderne. Les gens savent tous qu’ils ont besoin de sens ; revenir à ce premier essentiel est fondamental et un défi particulier pour ceux qui se réclament de cette foi. Les autres essentiels en découlent. L’Eglise prie pour que le Seigneur lui-même se révèle dans les vies de nos familles, de nos voisins et de nos compatriotes et jusqu’aux confins du monde.

5. LA FOI TEMOIGNE DE L’ACTION DE DIEU

La foi elle-même présuppose l’existence d’un Créateur qui s’est fait connaître dans l’histoire des humains et dans les Ecrits bibliques. Cette foi est une réponse à la révélation de Dieu, mais reste un cadeau destiné à restaurer la création déchue, déboussolée et abrutie par toutes sortes de dépendances (y compris l’Argent). Le juste vivra par la foi. Autant dire que la restitution aura pour premier acteur le Seigneur lui-même. La réforme ou restitution consiste donc à faire de nous les témoins de son action dans le monde, même si le christianisme est devenu minoritaire sous nos latitudes. Cela fera de nous des agents de la réconciliation et nous situera certainement dans la proximité des victimes des injustices de notre temps. Ceci à l’échelle du monde que Dieu aime.

6. UN RECENTRAGE SUR LE CHRIST RÉVÉLÉ DANS LES ECRITURES

La réforme permanente la plus urgente reste de s’ouvrir à l’action de Dieu et à la révélation de sa volonté dans la Bible : la création bonne par un Etre de communion et qui est juste ; les alliances par Noé, Abraham, Moïse, mais aussi les prophètes, et finalement Dieu intervenant directement en Jésus-Christ. Rien de très nouveau, à en croire les confessions de foi fondamentales du christianisme. Mais s’ouvrir  à Jésus-Christ sauveur sans s’imprégner d’Evangile pour mieux connaître le visage humain de Jésus, ses commandements, son Esprit et son royaume, c’est se tromper. Se tromper sur ce point, c’est corrompre l’Eglise elle-même, quelle que soit la dénomination ou l’organisation. C’est-à-dire que la transformation est indissociable du salut. Jésus sauveur est en même temps Seigneur.

7. UNE SPIRITUALITÉ INDIVIDUELLE ET COMMUNAUTAIRE UTILE

En Occident, Jésus est en concurrence avec les loisirs, la culture du plaisir personnel, de la consommation et du salut par l’accumulation de l’argent.  La spiritualité individuelle et les cultes chrétiens seront alors nécessairement des occasions de recentrement sur la présence du Christ et son Règne. C’est de lui par l’Esprit Saint que l’on vit le renouvellement, l’engagement éthique caractéristique du Christ, la direction et l’encouragement nécessaires.

8. UNE IDÉE DYNAMIQUE DE L’UNITÉ

Voir la réforme dans cette perspective ouvre des découvertes parfois inattendues. Cette réforme est une réforme des membres du corps de Christ et les hiérarchies auront à en tenir compte et sont invités à la promouvoir : la vie est en Christ et pas d’abord dans une organisation religieuse, fût-elle ancienne. C’est la nouvelle recomposition de l’unité autour de l’essentiel et du vital, et cette recomposition est en route. Tout ce qui converge vers Dieu, le Père créateur, le Christ rédempteur et prototype d’une création guérie et l’Esprit qui applique la nouvelle vie, fera l’unité de l’Eglise de demain. Un style de vie qui reflète le Christ fait partie des choses vitales pour l’Eglise. Pour les choses secondaires, mêmes importantes, il doit exister des manières de dire tranquillement le désaccord. L’unité attendue se manifeste d’abord localement. De passionnantes rencontres en résultent à toute sorte de niveaux.

9. AVANCER AVEC L’AIDE DU DIEU DE GRÂCE

Enfin, riche de cette connaissance de Jésus-Christ révélé dans les Evangiles, l’Eglise d’aujourd’hui doit apprendre, tout en partageant le simple Evangile avec joie, à confesser ses duretés, lâchetés, ornières, dans la confiance profonde d’un avenir où le Christ et son règne auront le dernier mot. Que se multiplient les lieux fraternels où le Christ vivant est au centre des célébrations, au centre des couples et des familles, au centre de la Parole aimée, au centre du repas du Seigneur, au centre des services à autrui, au centre des rencontres avec chacun, ami ou ennemi, au centre de l’économie, au centre de la responsabilité par rapport à la planète, au centre des échanges interreligieux ou avec les athées et les agnostiques, au centre des envois qui clôturent nos célébrations. Jusqu’à ce que le Christ en gloire vienne et introduise le Règne dans toute sa plénitude.

Sous quelle forme le christianisme existera-t-il dans 50 ans ? Bonne question, et bien malin qui saura y répondre. L’essentiel est d’être aujourd’hui fidèle au Christ avec ceux et celles qu’il appelle. Il promet d’être avec nous.

Claude Baecher, pasteur de l’Eglise évangélique de Meyrin (FREE) et implanteur d’une Eglise mennonite à Genève (Convergences)

 

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