Les frères et sœurs de la Bible

 Dans Christ Seul

Les relations entre frères et sœurs dans la Bible n’ont rien d’idyllique : elles sont souvent faites de rivalité, de jalousie, de tromperie, de haine, jusqu’au viol et au meurtre. Pourtant, ces récits enseignent aussi que la discorde n’est pas une fatalité.

Lorsqu’on évoque les frères et sœurs, beaucoup pensent à l’histoire de Caïn et Abel. Les fils d’Adam et Ève sont les deux premiers frères de l’humanité. Ils offrent tous deux des sacrifices à Dieu, qui regarde celui d’Abel, mais pas celui de Caïn. Ce dernier se fâche et tue son frère. Ainsi, le premier récit de fratrie est une histoire de fratricide. Son enseignement est-il que l’humanité est incapable de fraternité ?

DANS L’ANCIEN TESTAMENT, UNE FRATERNITÉ À CONSTRUIRE

Si ce premier récit était celui de la fraternité impossible, il n’y aurait pas d’autres récits de fraternité dans la suite des textes bibliques. Or, il existe de très nombreuses mentions de frères et sœurs dans la Bible. Le livre de la Genèse fournit de longues narrations très vivantes comme celle des jumeaux Jacob et Esaü (chapitres 25-33), des sœurs Rachel et Léa (29-31) ou des douze fils de Jacob (37-50). Après de longues années, Esaü et Jacob se réconcilient et trouvent moyen de vivre en paix, chacun dans une des régions du pays. La rivalité de mère et d’épouse de Léa et Rachel tend à s’apaiser. Joseph pardonne à ses frères et permet à toute sa famille de s’installer en Égypte, les sauvant ainsi de la famine.

QU’EST-CE QU’UN FRÈRE, UNE SŒUR ?

Joseph révèle son rêve à ses frères – James Tissot

Chacun de ces trois récits a une fin plutôt heureuse. Les fratries se retrouvent, les torts sont pardonnés, les rivalités se sont estompées ou résolues avec le temps et les familles peuvent vivre des relations apaisées. La relation fraternelle est chaque fois construite, établie ou rétablie, mise ou remise en place, par les sœurs et les frères eux-mêmes.

Le dramatique récit de 2 Samuel 13.1-22, dans lequel Tamar est violée par son demi-frère Amnon, souligne l’importance de la relation fraternelle en en montrant le contre-exemple parfait. Le silence de tous s’abat sur le récit, Tamar est laissée seule avec son chagrin ; plus tard, Absalom tuera son frère Amnon. Dans ce récit, l’absence de communication et de relation entre frères et sœur mène au fratricide, à l’échec de la relation fraternelle.

LA FRATERNITÉ, UN CHOIX

Le Nouveau Testament met en scène trois histoires de frères et sœurs. Dans le court épisode de la visite de Jésus chez Marthe et Marie (Lc 10.38-42), le personnage de Marthe est placé face à un dilemme : servir ou écouter Jésus. Le message donné ici est celui de l’importance du choix individuel. Il en va de même dans la parabole dite du fils prodigue (Lc 15.11-32)¹, où le fils aîné, resté à la maison, s’indigne de l’accueil festif du cadet. Le père lui répond qu’il « fallait se réjouir » de son retour et l’invite à se joindre à la fête, proposant une autre façon de voir les choses. Ces deux récits mettent en scène les personnages face à un conflit de devoirs, pour lesquels le récit propose un renversement de perspective. Tous deux restent en suspens, ne disant rien de ce que vont décider Marthe ou le fils aîné, laissant au lecteur le choix de l’issue possible. L’insistance est donc mise sur la décision personnelle.

UNE NOUVELLE FAMILLE

Dans le Nouveau Testament, la dimension spirituelle de la fraternité, où les frères et sœurs sont les coreligionnaires, devient essentielle. On trouve un fort discours de rupture d’avec la parenté biologique, puisque le salut repose sur un choix individuel² . Pour autant, la théologie néotestamentaire ne rejette pas la fraternité naturelle, mais elle en emprunte le modèle : tous sont « enfants de Dieu »³ et au moment de sa mort, Jésus dit à sa mère pour lui confier un disciple, « voilà ton fils ». Cette famille spirituelle est mentionnée très souvent dans le livre des Actes et les épîtres de Paul, ce qui montre l’importance croissante de cette notion. La fraternité biologique est donc destinée à être remplacée par la fraternité élective, ce qui est une façon de reconnaître la richesse de cette relation, malgré – ou peut-être à cause de – sa difficulté.

¹L’autre récit du Nouveau Testament qui commence par les mêmes mots (« un homme avait deux fils », Marc 21.22) ne met aucunement en scène les relations entre les frères ; ils sont toujours présentés comme des fils et non comme des frères.
² V. par ex. Luc 14.12 ; 18.19 ou 21.16 ; Matthieu 10.37 et 12.49-50.
³ V. par ex. Matthieu 23.9.
 Jean 19.26-27a

POUR ALLER PLUS LOIN…

Anne-Laure Zwilling, Frères et sœurs dans la Bible – Les relations fraternelles dans l’Ancien et le Nouveau Testament, Cerf, 2010

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