Réfugiés de guerre, un an après

 Dans Christ Seul

Partis précipitamment de Kyiv le 24 février 2022, Roman et Liuba German sont arrivés en Alsace le 3 mars avec leurs deux filles Janna (9 ans) et Lisa (5 ans), et Galina, la sœur de Liuba. Ils font partie des cinq millions d’Ukrainiens réfugiés en Europe.

Christ Seul : Dans quelles circonstances êtes-vous arrivés en France ?

Roman et Liuba : Le 24 février 2022, sous les bruits d’explosions, nous avons dû quitter notre logement pour nous réfugier chez nos parents en pensant que cela serait bref. Nous n’avons emporté que nos papiers et médicaments. Le soir même, nous avons repris la voiture avec nos parents pour nous éloigner de Kyiv et rejoindre nos grands-parents, à 300 kilomètres à l’ouest. La route était chargée, tous quittaient la capitale précipitamment. En sens inverse, on voyait des véhicules blindés et des soldats rejoindre Kyiv. Les explosions se poursuivaient un peu partout, nos enfants avaient très peur. Une personne nous a conseillé de mettre notre famille à l’abri en essayant de rejoindre notre sœur qui habite en France. La traversée de la frontière était difficile. Au troisième essai, nous avons pu enfin entrer en Roumanie où des chrétiens nous ont logés, habillés, ravitaillés et nous ont donné de l’argent pour poursuivre notre route. Nous pensions séjourner en France quelques semaines, et voilà une année que nous sommes ici.

C.S : Quels sont vos premiers souvenirs en France ?

La famille German habite depuis le 11 mai 2022 dans un logement mis à disposition par l’Église de Pfastatt. Crédit : Tania Nussbaumer

Roman et Liuba : L’accueil familial chaleureux et le soin accordé. Un collectif s’est rapidement mis en place pour nous accompagner dans nos premiers pas en France. Nous sommes arrivés sans rien et nous avons maintenant tout ce dont nous avons besoin pour vivre : nourriture, vêtements, logement et même une voiture. Les enfants vont à l’école et Liuba dispose d’un suivi médical indispensable à sa situation. Nous accueillons tout cela comme une bénédiction au milieu de ce drame.

C.S : Comment ces événements ont-ils façonné votre foi ?

Roman et Liuba : Ils n’ont fait que renforcer notre foi. Nous avons compris que chaque moment de notre vie dépend du Seigneur. Nous n’avions jamais rencontré une telle situation et nous nous sommes mis à imaginer ce que nous aurions fait si nous avions été accueillants plutôt qu’accueillis. Des personnes âgées de l’Église ont partagé avec nous leur vécu de la Seconde Guerre mondiale, les déplacements qu’elles ont consentis, et elles nous ont encouragés à garder l’espoir que cette guerre va se terminer. À notre arrivée, nous avons tout de suite été incorporés dans un partenariat de prière intergénérationnel, mis en place à l’Église. Une famille a prié quotidiennement pour nos enfants et a créé les premiers liens. Lors du premier culte, nous avons écrit une prière, l’avons placée dans un pot et avons semé des graines par-dessus. Les premières pousses sont devenues des signes visibles et vivants que Dieu entend nos prières.

C.S : Quels sont les obstacles que vous rencontrez aujourd’hui ?

Roman et Liuba : Le plus grand obstacle est l’apprentissage du français. Même si nous prenons des cours, nous nous rendons compte que les enfants progressent plus vite que nous. Cette semaine, notre fille aînée a écrit sa première dictée sans fautes.

C.S : Un an déjà que la guerre a commencé. Comment vivez-vous cela aujourd’hui ?

Roman et Liuba : Nous vivons toujours en regardant les nouvelles de ce qui se passe en Ukraine. Nous pensons en permanence à nos proches restés en Ukraine ou déplacés. Un grand soutien : la rencontre quotidienne en distanciel avec notre famille élargie en fin de journée. Nous échangeons des nouvelles, lisons ensemble la Bible et prions les uns pour les autres.

C.S : Que devient le reste de votre famille ?

Roman et Liuba : Nous avons une très grande famille. Une trentaine de personnes¹ ont quitté l’Ukraine pour la Roumanie, l’Allemagne, le Luxembourg, la France. Ainsi, un cousin atteint d’une maladie incurable peut bénéficier de soins médicaux continus qu’il n’aurait pas pu avoir en Ukraine. Chaque famille essaie de s’adapter à son environnement, en s’intégrant notamment dans les Églises et via les Églises. Les autres sont restés en Ukraine. Ils gardent courage, sont solidaires les uns des autres et aident les plus démunis. On essaie ensemble de les soutenir et de les aider depuis l’étranger.

C.S : Les enfants, pouvez-vous nous parler d’une belle chose vécue en France ?

Crédit : Roman German

Janna : Notre grand-père a pu venir nous visiter. Il nous a fait la surprise. Un matin il était là, devant notre porte. J’ai aussi pu avoir des cours de natation !

Lisa : J’ai pu aller à l’école pour la première fois en France et j’ai reçu une boîte de lego à Noël.

C.S : Une parole d’encouragement ?

Roman et Liuba : Nous sommes reconnaissants pour toute l’aide reçue, parfois de personnes que nous ne connaissons pas ou encore du gouvernement qui a mis en place un régime de protection temporaire pour les déplacés. Nous le savions déjà, mais nous l’avons encore expérimenté toute cette année : Dieu peut faire sortir du bien d’un grand mal.

C.S : Comment pouvons-nous prier pour vous ?

Roman et Liuba : Priez

• pour que la guerre se termine et que nous puissions retourner en Ukraine.

• pour la protection de nos proches en Ukraine.

• pour la persévérance dans l’apprentissage du français et le discernement pour trouver un travail adapté à nos dons et possibilités.

 

¹ Majoritairement des tantes et cousines. Les conditions de sortie étant difficiles pour les hommes, plusieurs familles ont opté pour un déplacement sélectif des femmes et enfants.

Propos de Roman et Liuba German recueillis par Alexandre Nussbaumer

Traduction : Tania Nussbaumer

 

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