Télescopages

 Dans Christ Seul, Explorer

Ouverture et tri. Une double attitude devant la vie….

Cette photo a été prise à Rome. Ceux qui ont déjà voyagé en Italie auront reconnu la prolifération de motos qui s’observe, là-bas, dans tous les centres urbains. Mais des photos prises ailleurs en Europe auraient pu, facilement, donner la même impression.
Car l’œil qui se promène sur cette image observe, côte à côte, des éléments disparates. Les motos qui encombrent le premier plan ne sont pas le seul sujet de cette photographie. On devine des voitures garées derrière les motos et, ici ou là, quelques piétons qui se dirigent vers une destination quelconque. A gauche et à droite, des affiches électorales, correspondant aux élections régionales du 28 mars, s’étalent. Un bâtiment est en cours de réfection et on imagine que des ouvriers s’activent derrière les bâches. Le début de rue que l’on voit n’est lui-même pas homogène. La maison qui est à droite de l’église paraît plus récente qu’elle. Elle ne s’harmonise avec aucun des bâtiments autour d’elle. Ni sa couleur jaune, ni son style, ni même l’alignement de sa façade ne sont « raccord ». On entraperçoit, sur les marches de l’église, caché par le panneau bleu, quelqu’un qui mendie. Car l’église est ouverte : il s’agit d’un bâtiment qui se visite (Santa Maria della Vittoria) et qui abrite une statue étrange, mélangeant le sacré et le profane, le recueillement de la foi et l’animation d’un théâtre.
Les motocyclistes qui ont garé leur véhicule, les piétons, les ouvriers, le mendiant, les touristes, les colleurs d’affiches ont tous traversé ce lieu, mais chacun avec un but différent. Et tous ne peuvent que constater que cette place est un décor composite, assemblant des époques et des styles différents, devant une église qui, elle-même, expose une œuvre mélangeant les genres.

VIE QUOTIDIENNE

Que penser d’un tel tableau ? Il me semble être une bonne illustration de notre vie quotidienne. Est-ce que, dans notre tête, ne se mélangent pas des préoccupations de toute sorte, mêlant politique, bricolage, moyens de transport et questions religieuses ? Nous passons, au fil de la journée, d’un sujet à l’autre. Nous traversons des lieux qui sont dédiés à un thème plutôt qu’aux autres, mais également des lieux ouverts qui entrecroisent tous les thèmes. Nous sommes devenus les gestionnaires d’une vie quotidienne complexe et entremêlée. Faut-il le regretter ? C’est à voir. La présente photo ne donne pas une impression de perte de repères ou de stress exagéré.

HIER ET AILLEURS

Et moi qui appuie sur le déclencheur, je mets en perspective des époques historiques différentes qui sont, soudain, toutes réunies. L’église me parle d’un temps où l’homme de la rue était très concerné par les questions religieuses. L’affiche politique a eu son heure de gloire, mais il y a moins d’espoirs placés dans la politique aujourd’hui qu’hier. L’abstention progresse dans tous les pays démocratiques. Faut-il alors penser que tout tourne aujourd’hui autour des belles motos et des belles maisons ? Peut-être, mais pas exclusivement. En fait, tous les éléments sont là dans une simultanéité troublante. La condition de l’être humain d’aujourd’hui est de pouvoir avoir une idée de ce qui se passait hier et de ce qui se passe ailleurs. Tout cela l’habite. Le guide que j’ai à la main m’aide à faire ces allers et retours. Mais il suffit de regarder la télévision pour que l’ailleurs ou l’hier s’invitent dans notre salon.

DU NEUF ET DU VIEUX À TRIER

Chez certains, ces multiples télescopages provoquent du cynisme : j’ai tout vu, j’ai fait le tour de tout et je ne considère rien comme étant central ou primordial, disent-ils.
Pour ce qui me concerne, je pense à autre chose. Je pense aux multiples époques rassemblées dans la Bible, à Dieu qui, fidèlement, a parlé à des personnes successives et différentes et au témoignage qui nous en reste. « Après avoir, dit l’épître aux Hébreux, à bien des reprises et de bien des manières, parlé autrefois aux pères par les prophètes, Dieu, en la période finale où nous sommes, nous a parlé à nous en un Fils qu’il a établi héritier de tout » (Hb 1,1-2). Jésus a relu l’Ancien Testament et lui a donné une portée nouvelle, sans l’abolir pour autant. Dans la première Église, les Juifs et les Grecs ont compris le message de Jésus-Christ, chacun en fonction de leur passé propre. C’est maintenant à mon tour de me positionner par rapport à l’histoire qui m’a précédé. Qu’est-ce qui me parle ? Qu’est-ce qui me paraît vain ? Quel témoignage représente un appel pour moi ? Comment puis-je utiliser tout ce matériau pour marcher aujourd’hui à la suite du Christ ? J’entends ici une parole de Jésus-Christ pour inciter, justement, ses auditeurs à faire le tri au milieu de leur passé et de leur présent : « Tout scribe instruit du Royaume des cieux est semblable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et du vieux » (Mt 13,52). J’ai un trésor sous les yeux. A moi de faire le tri !

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