Israël – Palestine (8) : histoire de victimes

 Dans Blog, Israël - Palestine

Suite du voyage, avec les réflexions inspirées de la visite du mémorial de la Shoah à Jérusalem ce dimanche.

La visite au mémorial de la Shoah à Jérusalem nous a pris cette après-midi presque trois heures qui ont à peine suffi à étaler « l’horreur absolue ». La nausée que je ressens après chacune des ces visites dans l’un des lieux de mémoire me poursuit encore ce soir. Il est si artificiel de classer les génocides comme les éruptions volcaniques ou les tremblements de terre par leur nombre de victimes et de faire de la Shoah un génocide sans égal dans l’histoire humaine. C’est probablement vrai. Les historiens l’attribuent à une conjonction diabolique de facteurs sociaux où prennent place l’esprit de revanche suite à la défaite de 1918, la crise économique de 1929 et la pauvreté des masses populaires, la personnalité du Führer, la propagande habile de Goebbels, la haine multiséculaire mais accrue et entretenue des Juifs, l’efficacité de l’administration allemande appliquée à la solution finale…

Mécanismes humains
Sensibilisés que nous sommes sur la situation palestinienne, des parallèles sautent aux yeux. Pourtant, ces parallèles sont vécus comme une offense à la mémoire des victimes par leurs descendants certes mais aussi tous les Juifs sionistes qui se considèrent comme des « survivants de la Shoah ». Pour avoir transgressé ce tabou dans un article inspiré pourtant d’un Juif qui fait autorité, Avraham Burg dans « Vaincre Hitler », j’ai eu il y a quelques années à affronter les foudres d’un ami évangélique juif sioniste. Puis-je donc poser d’emblée que la Shoah est une horreur inégalée par sa dimension, mais que les mécanismes à l’oeuvre sont tout simplement humains ? C’est-à-dire analysables et donc malheureusement reproductibles avec la même intensité si nous n’y prenons garde ?

Victimisation
La victimisation fait partie de ces mécanismes que A. Burg décrit comme l’une des racines du « problème israélien », c’est-à-dire l’incapacité des Juifs à trouver un terrain d’entente avec les Palestiniens. Le mémorial YAD VASHEM établit un lien clair entre l’humiliation qu’a été pour les Allemands l’armistice de 1918 (et le traité de Versailles qui a suivi) et la montée des idées national-socialistes aux dépens des Juifs. Aujourd’hui, en Israël les horreurs de la Shoah justifient à elles seules le droit au retour en Palestine. Le retour sur le passé meurtri opère aujourd’hui au moins autant que la motivation religieuse ou le projet de société égalitaire mis en avant par les premiers colons. Or, cette unité suppose la désignation d’un bouc émissaire tout trouvé : le Palestinien qui se met en travers de cette dignité retrouvée. La radicalisation de l’islam en Palestine et dans les pays environnants ajoute de l’eau à ce moulin : Israël, seul état démocratique du Moyen Orient, lutte seul contre tous pour sa survie. Vu d’Occident, comment ne pas soutenir ce qui autrement serait dénoncé comme un délire sécuritaire ? Victime un jour, victime toujours.

Discriminations
La visite du mémorial suggère bien d’autres parallèles à l’œuvre dans la discrimination subie par les Juifs et qu’ils imposent aujourd’hui aux Palestiniens. Au nom de la sécurité, l’Etat israélien délivre et ordonne la détention de cartes d’identité différente suivant l’origine, on stigmatise et humilie les Palestiniens à tout moment (notamment aux check points, où on les oblige à se dévêtir), on contrôle ou interdit leurs déplacements, leur accès à l’éducation, au logement, on les expulse de leur terres, on s’approprie leurs biens, on les emmure, on laisse impunies les voies de fait souvent mortelles des religieux extrémistes. Une propagande extrêmement pernicieuse et virulente exploite tout événement violent de la part des Palestiniens pour justifier « les représailles ».

Absence de contre-pouvoirs
Encore une fois, les proportions ne sont pas les mêmes, mais les mêmes mécanismes sont à l’œuvre. Il ne reste plus beaucoup de contre-pouvoirs aujourd’hui en Israël : les partis de gauche sont muselés ou observent l’omerta sur la question palestinienne. Les médias d’importance comme la TV sont soumis à un régime d’autorisation suivi par les services secrets, les opposants sont harcelés. Restent quelques chaînes ou journaux indépendants et les pressions extérieures que les associations juives américaines très puissantes essaient de contrôler. Les « Eglises protestantes » essuient actuellement une volée de bois vert de la part des lobbys des dites associations suite à une demande d’embargo militaire faite au Congrès américain.

Daniel Goldschmidt

Contactez-nous

Envoyez nous un courriel et nous vous répondrons dès que possible.

Illisible ? Changez le texte. captcha txt
0

Commencez à taper et appuyez sur Enter pour rechercher