En exil, en France, au Burkina-Faso, partout…

 Dans Christ Seul, Explorer

La situation d’exilé au sens propre n’est guère facile. C’est le modèle proposé aux chrétiens, comme manière d’être générale.Réflexions par Paul Solomiac, qui vit à cheval entre deux pays et deux cultures depuis 27 ans…

« Bien-aimés, je vous encourage, en tant que résidents temporaires et étrangers sur la terre, à vous abstenir des désirs de votre nature propre qui font la guerre à l’âme. Ayez une bonne conduite au milieu des non-croyants, afin que, là même où ils vous calomnient comme si vous faisiez le mal, ils remarquent votre belle manière d’agir et rendent gloire à Dieu le jour où il interviendra. » 1 Pi 2. 11-12, (version Segond 21)
En tant que résidents hors de France, nos amis s’intéressent souvent à notre regard sur l’Église en France ; sous-entendue, la question du conformisme au monde dans l’Église se pose, avec pour nous la difficulté de nous prononcer sans passer pour des donneurs de leçons. Nous venons justement de passer six mois en France et on n’a pas manqué de nous poser la question… De retour à Ouagadougou depuis la fin janvier (avec un bref passage en Alsace à nouveau actuellement), cette même réflexion sur les choix entre conformisme et non-conformisme dans le peuple de Dieu nous poursuit. L’étude biblique hebdomadaire que je fréquente à Ouagadougou vient de commencer l’étude du livre de Daniel. Et puis, j’ai dernièrement entendu une prédication sur les versets d’en-tête de 1 Pierre qui soulignait quelques aspects fondamentaux du non-conformisme chrétien.

Ne pas rendre le mal pour le mal

En premier lieu, l’apôtre met en garde contre les désirs de la nature humaine (ce que les anciennes versions appelaient la « chair ») qui font la guerre à l’âme. Disciple de Jésus de la première heure, Pierre devait certainement penser, parmi tous ces désirs, à la guerre dans laquelle son Maître avait été engagé durant son ministère terrestre où la voie de la violence et du pouvoir par la force lui avait été maintes fois suggérée ; « rendre le mal pour le mal, et l’insulte pour l’insulte » (1 Pi 3.9), voilà un comportement d’exilé sur terre qui pouvait mettre à mal le témoignage d’un disciple de Jésus.
Daniel, en situation d’exil, a durant sa longue carrière été en butte à des « ennemis dans l’ombre » et a certainement été tenté de profiter chaque fois de sa situation pour se venger et asseoir sa sécurité.
Au 21e siècle, certains chrétiens des nations autrefois chrétiennes comme la France ont du mal à accepter qu’il n’existe plus aujourd’hui quelque chose qu’on pouvait appeler une culture et un monde chrétiens et qui permettait à tout moment d’invoquer la violence pour défendre « le bien ». En contraste avec la déchristianisation de l’Europe, en Afrique où la foi en Jésus est en pleine croissance, la tentation est grande pour certains leaders chrétiens de pousser les états laïcs à instaurer des pendants « chrétiens » aux nations islamiques… ce qui fait frémir.

Une bonne conduite envers tous

En second lieu, l’apôtre encourage ses lecteurs à toujours afficher une bonne conduite. À l’époque à laquelle Pierre écrivait, les chrétiens étaient en effet souvent victimes de toutes sortes de calomnies. L’empereur Néron leur a fait porter le chapeau pour l’incendie de Rome en l’an 64 de notre ère. Difficile, quand on est en minorité et qu’on est faible de prouver que la rumeur est fausse ; c’est pourquoi, l’apôtre encourage ses lecteurs à adopter un mode de vie tel que leur entourage ne puisse pas manquer de remarquer leur belle manière d’agir. D’après Alan Kreider dans son livre « Catéchèse, baptême, mission – Leçons d’hier pour l’Eglise aujourd’hui », cette habitude de faire le bien autour d’eux a valu aux premiers chrétiens la réputation d’amour qui faisait tellement défaut au reste de l’empire romain.
Daniel et ses trois compagnons d’exil avaient adopté la recommandation de Jérémie (29.7) de rechercher le bien-être de la ville où ils avaient été déportés ; leur situation d’administrateurs et de conseillers leur a permis de faire le bien autour d’eux. Malgré les calomnies et les injustices dont ils étaient les victimes à cause de leur non-conformisme, leur belle manière d’agir leur valait toujours le respect des tyrans qu’ils servaient.
Ce n’est pas sans une certaine fierté que je lisais récemment dans les nouvelles de l’Institut Biblique de Nogent tout le bien que le groupe des Lightworkers avait pu faire aux locaux que j’ai fréquentés voilà presque 30 ans… On aimerait que ce type d’initiative de service serve de modèle à plus de groupes de nos assemblées. J’étais aussi intéressé d’apprendre que les Églises et Missions réunies en fédération au Burkina-Faso s’étaient fixé comme initiative d’évangélisation d’atteindre les populations non encore évangélisées sous la stratégie « 1 village, 1 église, 1 école ». L’éducation pour tous est certainement un bien qui fait défaut dans ce pays.

Acquérir des biens ou faire le bien

Le non-conformisme de Daniel et de ses compagnons ainsi que celui des premiers chrétiens nous renvoient à des situations auxquelles nous pouvons difficilement nous identifier ; en ce début de 21e siècle, suivre Jésus ne constitue pas un risque énorme pour ma vie, que je sois en France ou au Burkina-Faso ; le relatif confort des disciples de Jésus dans les pays christianisés ne doit pourtant pas nous faire ignorer les enjeux éthiques de notre appartenance au peuple de Dieu.
Notre vie de disciples de Jésus montre-t-elle que nous sommes des exilés de passage ici-bas ? Notre citoyenneté s’exprime-t-elle par un patriotisme cocardier ou par la douceur d’une belle conduite ? Lorsque nous pensons à nos priorités dans la vie, est-ce en termes de biens à acquérir pour nous ou en termes de bien à faire autour de nous ?
Que ce soit en France ou au Burkina-Faso, j’estime qu’il est de notre devoir de nous poser régulièrement ces questions.

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