Comment mon Église peut-elle rester unie et solidaire dans une société divisée ?

 Dans Christ Seul

Voilà une question que beaucoup de pasteurs des États-Unis se sont posée pendant les dix dernières années. Dans ce pays qui se veut « une nation unie sous l’autorité de Dieu », force est de constater que des divisions dévastatrices démentent continuellement l’idéal national. Cela n’a pas échappé à Leah Schade, une pasteure luthérienne et professeure de théologie. Sa méthode appelée « Sermon-Dialogue-Sermon » permet d’aborder des sujets qui divisent (le racisme, le port d’armes, l’immigration, le réchauffement climatique, etc.) et de pacifier les Églises.

LE RÔLE DE L’ÉGLISE DANS UNE SOCIÉTÉ DIVISÉE

Leah Schade définit trois rôles à l’Église : lieu de refuge, médiatrice, porteuse de la voix prophétique. Les responsables des Églises ont le devoir d’aller à la rencontre des personnes, de les accueillir et les écouter avec respect, tout en prenant au sérieux le rôle prophétique sur la chaire et sur la place publique. Schade regrette que les chrétiens américains aient perdu la capacité de se parler de manière constructive sur les sujets controversés. Alors que les groupes polarisés ont tendance à voir le monde en termes binaires (« nous » et « eux », « vrai » et « faux »), l’Église doit éviter d’être une famille divisée (Matthieu 12.25).

LA MÉTHODE SERMON-DIALOGUE-SERMON

Le Pr. Leah Schade, United Lutheran Seminary Philadelphia, avec son livre de référence Preaching in the purple zone

En 2017, après avoir sondé 1200 pasteurs américains, Schade a constaté que la grande majorité d’entre eux avait besoin de formation pour mieux prêcher. S’inspirant du « dialogue constructif » (« deliberative dialogue »), Schade a élaboré une méthode appelée « Sermon-Dialogue-Sermon ». Une fois le sujet « chaud » identifié, la méthode s’applique en trois étapes : un premier sermon (la prédication), suivi par des séances de « dialogue constructif » au sein de la communauté, et un deuxième sermon qui clôt la démarche.

Le premier sermon (« conversational preaching ») a pour fonction de rétablir un dialogue sain entre les participants dans l’Église, en insistant sur les approches de paix que sont l’écoute de l’autre, la compréhension et le discernement. Dans le message, le prédicateur/la prédicatrice ne prend pas position mais l’encadre dans un contexte spirituel et théologique. Les chrétiens sont encouragés à participer aux séances de dialogue constructif, dans la confiance que le Saint-Esprit aidera le discernement.

Le « dialogue constructif », modéré par un facilitateur, implique des rencontres en petits groupes. Les participants établissent les règles de conduite des échanges. Ils expliquent en quoi le sujet leur importe en lien avec leur foi, et se rappellent leurs valeurs communes, souvent ancrées dans la foi. Ainsi peuvent-ils reléguer les clivages au second plan et rentrer en dialogue. À la fin des rencontres, le deuxième sermon intervient comme un sermon de suivi qui souligne les valeurs communes issues du dialogue ; il rappelle la présence de Dieu et du Saint-Esprit dans le dialogue vers une vraie communauté. La culture de l’Église se transforme ainsi, de l’évitement ou de la division à une conversation saine et un engagement fidèle.

Les pasteurs formés témoignent qu’après une phase d’adaptation, les expériences dans les paroisses américaines s’avèrent encourageantes. En dehors des États-Unis, la méthode a été appliquée dans la paroisse catholique Saint Charles Lwanga à Yaoundé (Cameroun) et a eu des résultats positifs.

SUGGESTIONS POUR NOS ASSEMBLÉES LOCALES

Bien qu’ayant leur histoire propre, les Églises de France peuvent apprendre de l’expérience américaine. Les points chauds ne manquent pas : la formation du même nom (« Points chauds ») du Bienenberg¹ l’a illustré. La polarisation grandissante risque de porter atteinte à l’entente et à la cohésion dans nos assemblées. Où en sommes-nous ? Est-ce que nous cultivons l’évitement ? Ou alors la division est-elle déjà en marche ?

La démarche Sermon-Dialogue-Sermon pourrait être un chemin pour rétablir une culture d’écoute, une communication saine et des relations apaisées, afin de prendre des décisions communes sereinement et pacifiquement. Chaque assemblée peut s’approprier cette démarche et trouver sa propre voie. Pourquoi ne pas explorer de nouveaux chemins ? Le Seigneur a donné l’exemple et sa Parole nous accompagne sur les sentiers de la Paix.

STEFAN HAACKE et THADDÉE NTIHINYUZWA

¹http://www.bienenberg.ch/points-chauds

Références pour aller plus loin :

Le livre Preaching in the Purple Zone

Résumés des chapitres

https://thepurplezone.net/resources-%26-links#58291944-3339-4437-b95e-a11c5e05416e

La plateforme d’information du Dr. L. Schade

https://thepurplezone.net

Exemples d’ateliers de formation

https://www.greatplainsumc.org/purple-zone-workshops

Le point de vue d’un professeur de théologie

https://theology.sewanee.edu/media/features/preaching-today-prophesy-and-partisan-politics/

Mémoire de Maîtrise du Père Jude T. Langeh : Collaboration in a Divided Zone. Sermon-Dialogue-Sermon Process in Saint Charles Lwanga Parish, Yaoundé, Cameroon, Aquinas Institute of Theology, September 2021.

 

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