Les fondements bibliques de la non-violence

 Dans Christ Seul

Le terme « non-violence » n’est pas utilisé dans la Bible. Mais ce que l’on comprend aujourd’hui sous ce terme y est bien présent.

LE PREMIER TESTAMENT

La notion de shalom dit positivement ce que « non-violence » formule négativement. Shalom, c’est une tranquille possession de biens, c’est le bonheur et la santé, et une entente cordiale rendue possible par le Dieu de paix, pour qui justice et paix sont indissociables (Ps 85). Les exemples de comportement non violent abondent dans le récit biblique (1S 24, 25 et 26) parallèlement à la description de guerres et de comportements violents. Les livres des prophètes annoncent le temps où le shalom de Dieu se réalisera pleinement : chacun vivra sous sa vigne et son figuier et on n’apprendra plus la guerre (Mi 4.4).

LE CONTEXTE DU MINISTÈRE DE JÉSUS

Comme tout le monde méditerranéen, la Palestine du temps de Jésus était soumise à l’occupation de l’Empire romain. La pression subie par la population se faisait ressentir à tous les niveaux : politique, économique, social et religieux. Les contemporains de Jésus répondaient à cette situation de diverses manières :

• le réalisme et la collaboration (les sadducéens)

• le retrait au désert (les esséniens)

• le retrait dans l’observance stricte des lois religieuses (les pharisiens)

• la révolution violente (les zélotes)

Jésus n’a adopté aucune de ces options. La voie qu’il a choisie est celle du shalom vétérotestamentaire que l’on peut décrire comme « non-violence active ».

JÉSUS INAUGURE LE ROYAUME DE DIEU QUI EST PAIX, JUSTICE ET JOIE DANS L’ESPRIT SAINT

Crédit photo : Aaron Burden

Il met en question la politique des riches pratiquée par les sadducéens, l’ostracisme pratiqué par les pharisiens, il ne se retire au désert que ponctuellement, il reste au milieu de ceux qui souffrent et confronte ceux qui sont complices de l’injustice. Il annonce de bonnes nouvelles aux pauvres, la libération aux prisonniers, la consolation aux cœurs brisés (Lc 4). Il exerce un ministère de guérison, il a pitié des affamés et invite ceux qui sont fatigués et chargés à le suivre. Mais il va plus loin. Le shalom qu’il incarne dépasse les limites permises à son époque : il inclut tous les êtres humains. Il brise les tabous qui excluaient les femmes et les étrangers (Jn 4). Il n’exclut personne, ni les soldats romains (Lc 7.2s), ni même les profiteurs du système (Lc 19.1-10).

Jésus crée la communauté sur des fondements nouveaux. Enraciné dans la tradition de son peuple, il poursuit une ligne présente dans tout le premier Testament : le salut et la bénédiction de Dieu sont pour tous les humains (Gn 12). La seule option qui soit vraiment une tentation pour lui est celle choisie par les zélotes. Plusieurs disciples étaient des zélotes, les terroristes de l’époque. Jésus rejette cette option sur un point précis : la violence comme moyen de libération. Si l’ennemi est inclus dans l’amour de Dieu, alors la question de l’usage de la violence doit être redéfinie.

UNE VIE DE NON-VIOLENCE

Crédit photo : Unsplash

Le choix de Jésus en faveur de la non-violence se manifeste dans des moments cruciaux de son ministère : à plusieurs reprises, il échappe à ses ennemis (Lc 4.30, Mt 12.15, Jn 8.59, 10.39). Il empêche ses disciples de faire appel à la violence ou d’en faire usage (Lc 9.51-56, 22.51b, Jn 18.11). Lors de son arrestation et de son procès, il supporte les mauvais traitements, les calomnies et les insultes sans se défendre (Mt 26.50-56, 27.27-30). Enfin, il accepte de subir le supplice de la crucifixion (Mt 27.31s). 1 Pierre 2.21-22 résume ce cheminement non violent.

Deux situations semblent faire exception : le récit de la purification du temple (Jn 2.13-16) et la discussion concernant les deux épées (Lc 22.36-38). On notera que le récit de la purification du temple, s’il présente un Jésus énergique, armé d’une corde et qui a renversé des tables et dispersé des animaux, ne mentionne pas qu’il ait attaqué physiquement les vendeurs. Quant au récit des deux épées, il reste une énigme pour les exégètes de tous les temps. Lorsque l’une des deux épées blesse un serviteur du grand prêtre, Jésus guérit le blessé et condamne cette action dans les termes les plus clairs (Mt 26.52).

UN ENSEIGNEMENT SANS ÉQUIVOQUE

L’essentiel de l’enseignement de Jésus peut se résumer en un mot : l’Amour/Agapè. C’est le plus grand commandement. La norme de l’amour selon Jésus est l’abondance et non la réciprocité (Mt 5.38-45). Le modèle à suivre est le Père (Lc 6.36) et le Fils (Jn 13.34). La dynamique de l’amour est tridimensionnelle : Dieu aime l’être humain qui est appelé à aimer Dieu et à transmettre l’amour reçu à son prochain. L’amour selon Jésus se manifeste par des actes : il dépasse l’amour naturel en prenant l’initiative (Lc 6.33), n’exclut personne (Lc 6.22), n’attend pas de récompense (Lc 14.12-14). Il travaille à enrayer la spirale de la violence et de la vengeance (Lc 6.27-30). Par ailleurs, Jésus condamne la violence sous toutes ses formes : les plus subtiles (Mt 5.21), les plus manifestes (Mt 26.52) et celles que l’on voudrait justifier religieusement (Lc 9.51-56).

La vie et l’enseignement de Jésus forment un tout. Enraciné dans les Écritures de son peuple, Jésus s’attache à vivre et à enseigner ce qui est le fondement de la paix véritable entre Dieu et les êtres humains et les êtres humains entre eux. Il affirme que l’amour de Dieu est valable aussi pour nos ennemis et en tire les conséquences pour notre relation avec eux. La non-violence de Jésus est active et se manifeste dans la pratique. Elle repose sur une spiritualité communautaire fondée sur la confiance en Dieu. Le Sermon sur la montagne, charte du Royaume de Dieu, pose le fondement spirituel de celui-ci dans les Béatitudes et donne des instructions concrètes sur le comportement à avoir vis-à-vis de quiconque et en particulier vis-à-vis de l’ennemi. Il propose des gestes paradoxaux qui dynamisent les victimes et sont destinés à enrayer le cycle de la haine et de la contre-violence et à déjouer la tactique de l’adversaire sans reproduire son comportement.

UNE RÉALITÉ NOUVELLE

Le livre des Actes des apôtres et les épîtres soulignent que la non-violence de Dieu se manifeste dans son œuvre de réconciliation en Jésus. En lui, une réalité nouvelle a commencé (2Co 5.16-21). Ces écrits appliquent son enseignement aux conflits qui divisaient l’Église, mettant en question tout ce qui sépare les humains de Dieu et détruit les relations (Rm 5.6-11, Ga 3.26-29, Ep 2.11-22). L’Église, communauté réconciliée constituée de ceux et celles que tout séparait autrefois, est le lieu où se manifeste la réconciliation avec Dieu. Elle est chargée de transmettre en paroles et en actes ce message qui englobe le cosmos tout entier. Bonne nouvelle pour les disciples et pour le monde (Col 1.10-22). La non-violence biblique n’est donc pas une idéologie. Elle est l’expression de la volonté de Dieu pour ceux et celles qui se réclament de lui.

 

Contactez-nous

Envoyez nous un courriel et nous vous répondrons dès que possible.

Illisible ? Changez le texte. captcha txt
0

Commencez à taper et appuyez sur Enter pour rechercher