Libéré(e) de la culpabilité
La culpabilité est, d’après le dictionnaire, le sentiment qui nous habite lorsque nous nous sentons, à tort ou à raison, coupables d’avoir transgressé une règle. Le dictionnaire biblique nous renvoie à la rubrique « péché ». Y a-t-il toujours faute, péché ? Distinguons deux sortes de culpabilité : la culpabilité saine et la culpabilité malsaine.
CULPABILITÉ SAINE
La culpabilité saine est l’expérience que je fais lorsque je déroge à mes valeurs profondes et que j’avais le choix de ne pas le faire. Ce sentiment fait surgir différentes émotions en moi, que je gagne à identifier pour apporter la réponse appropriée.
Suis-je en colère contre moi d’avoir outrepassé mes principes, déçu(e) de mon comportement, triste d’avoir blessé quelqu’un ? Un tribunal intérieur m’accuse, me pousse à rétablir l’équilibre intérieur ou la relation. Qu’ai-je besoin de reconnaître, de transformer, de réparer ? Le puis-je encore ? En fonction des faits et de leurs conséquences, le chemin sera plus ou moins aisé à parcourir.
Quand je me sens coupable, une question simple est éclairante : de quoi suis-je responsable ? Pour des choses de la vie ordinaire, lorsque je reconnais mon tort, l’assume et cherche à réparer, le sentiment de culpabilité se résout et la paix revient. Je suis à nouveau en accord avec moi-même. La culpabilité saine est utile pour réguler nos comportements en société. Elle nous conduit à nous transformer pour mieux vivre avec les autres, dans le respect et l’amour.
LE PARDON DE DIEU, UNE PUISSANCE DE GUÉRISON
Pour approfondir, on peut étudier des personnages bibliques. Comment Pierre sort-il de la culpabilité après son reniement ? Comment évolue-t-il spirituellement après sa rencontre avec le Ressuscité ? Que dit Paul de lui-même, comment transforme-t-il sa culpabilité d’avoir été persécuteur de l’Église et l’intègre-t-il dans son histoire pour ne pas en demeurer prisonnier ? Quelle trace laisse-t-elle lorsqu’il parle de lui-même ? Le pardon de Dieu, offert et reçu au profond de nous, est une puissance de guérison pour nos ressentis corporels, nos émotions et le renouvellement de nos pensées (Rm 12). L’expérience de la bonté de Dieu restaure notre valeur et nous donne la force d’assumer les conséquences de nos actes.
« Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner, nous purifier de nos péchés » (1J 1.9). Qu’est-ce qui a besoin d’être reconnu, rencontré, pardonné, nettoyé par l’amour ?
Quand le sentiment de culpabilité devient-il problématique ? Lorsqu’il ne passe pas, nous fait ressasser le passé et entrave notre vie présente. Des symptômes peuvent se montrer dans notre corps ou notre être intérieur.
CULPABILITÉ MALSAINE
Quelque chose de diffus agit au fond de moi, une dévalorisation, une auto-condamnation qui consomme de l’énergie et me plombe. Je me juge et ça ne passe pas. La situation que je me reproche est-elle réelle ou imaginaire ? Je me dis que j’aurais dû faire ou ne pas faire quelque chose… J’ai posé un choix avec les données du moment et, depuis, je refais l’histoire en me donnant tort.
Quelle est la fonction de cette culpabilité ? Certaines personnes ne s’accordent pas le droit de vivre et d’être heureuses. Elles préfèrent continuer à se faire payer pour un passé dont elles ne sont pas toujours responsables. Rester inconsciemment victimes leur évite d’exercer leur responsabilité pour transformer ce qui peut l’être et oser être actrices de leur vie. Je reçois en entretien des personnes en crise qui ploient sous un Évangile devenu un catalogue d’injonctions et d’exigences de perfection. Renoncer à une idéalisation de la vie chrétienne et accepter que les autres ou nous-mêmes sommes faillibles nous conduit à faire le deuil de pertes. « Si le Fils vous affranchit, vous serez réellement libres » (Jean 8.36). Cette bonne nouvelle nécessite notre coopération. À certains moments, solliciter l’aide d’un(e) ami(e), d’un(e) pasteur(e), d’un(e) professionnel(le) de l’écoute nous sera bénéfique.
LIBÉRÉ(E) DE LA CULPABILITÉ ?
Parfois, reconnaître sa faute, demander pardon et le recevoir de Dieu dans ce merveilleux renouvellement de l’intelligence sera suffisant. Parfois, il s’agira de prendre conscience de ce qui tiraille notre psychisme pour accepter notre choix passé, fait avec les moyens dont nous disposions au moment où nous l’avons fait, et faire le deuil de ce qui n’a pas été bénéfique à l’autre ou à soi-même.
C’est pour la liberté que nous avons été affranchis. Non pour rester prisonniers, ni du péché, ni d’un mental tyrannique qui nous empêche d’accueillir la grâce de Christ. Cela peut prendre du temps de laisser le Saint-Esprit consolateur pacifier ces zones profondes. L’enjeu est de nous désencombrer de ce qui entrave notre marche et nourrit notre ego, par l’accueil du pardon, de la libération, de la tendresse de Dieu qui unifie notre être. Alors, avec l’apôtre Paul, en conscience, et merveilleusement repêchés, nous dirons non pour nous dédouaner, mais au contraire pour accepter la réalité de notre nature humaine pécheresse et sanctifiée : « Par la grâce de Dieu, je suis ce que je suis ! » (1Co 15.10)
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